Synthèse des travaux en cours sur l’impact environnemental des viandes, la protection des animaux, l’équilibre alimentaire, la demande du marché et la réponse aux attentes du consommateur afin de garantir une viande de qualité, produite de façon raisonnée et durable
INTRODUCTION
Depuis plus de 35 ans, INTERBEV pilote des études ambitieuses en matière de R&D, d’économie et de socio-consommation. Avec la mise en place en 2018 des Plans de filière et de la démarche collective de responsabilité sociétale, la recherche interprofessionnelle a pris davantage d’envergure. D’un outil permettant de répondre aux besoins quotidiens des professionnels, elle est également devenue un des leviers d’action.
Pour cette matinée, le thème fédérateur et stratégique du « Manger mieux » a été retenu, en cohérence avec la stratégie interprofessionnelle et la campagne de communication collective « Aimez la viande, mangez-en mieux ». Les études d’INTERBEV présentées lors de cette matinée témoignent de la volonté d’intégrer toujours mieux les attentes de la société française sur les modes de production de viande et de garantir aux citoyens une alimentation de qualité, raisonnée et durable.
I. LA RECHERCHE POUR MIEUX EVALUER L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL DES VIANDES
1.1. Développer l’écoconception & améliorer l’évaluation environnementale en filière bovine (Projet OEKOBEEF).
Dans le cadre de l’appel à projet lancé par l’ADEME (2019) baptisé « GREEN GO – vers la performance environnementale de vos produits », visant à soutenir et déployer les démarches initiées par les filières agricoles en faveur d’une production plus durable, les résultats du projet « OEKOBEEF » ont été présentés par Maxime Fossey (Idele). Cette étude INTERBEV est une initiative s’inscrivant dans les objectifs du développement durable à laquelle répond son plan de filière par son PACTE pour un engagement sociétal.
Ce projet vise ainsi à inscrire la viande bovine, et plus particulièrement la production sous Signes Officiels de Qualité et de l’Origine (SIQO), dans une véritable démarche d’écoconception sur la base d’évaluations environnementales réalisées selon l’Analyse de Cycle de Vie (ACV) mais également en tenant compte de critères complémentaires faisant état des contributions positives de l’élevage herbivore. En effet, on constate depuis 2020, une progression de la remise en cause de la seule méthode ACV pour réaliser les évaluations environnementales sur les produits issus de l’élevage herbivore. Dans ce contexte, plusieurs enjeux stratégiques pour la filière viande sous SIQO ont été analysés : (i) le positionnement de la filière sur un ensemble de produits viandes disponibles (conventionnel, Label Rouge, importation), (ii) une proposition d’indicateurs complémentaires rendant compte des services écosystémiques rendus par l’élevage herbivore (stockage de carbone, biodiversité et santé des sols), et (iii) l’identification des axes de progression collectifs et des propositions de pistes d’amélioration du cahier des charges commun Label Rouge bovin de la filière.
Cette étude doit permettre la diffusion des bonnes pratiques pour accompagner, sur le terrain, le déploiement et la sensibilisation aux démarches d’écoconception. Par ailleurs, les résultats de ce projet « OEKOBEEF » peuvent également fournir une base à la construction d’un argumentaire en faveur de la prise en compte d’une information plus globale utilisée dans le cadre de l’expérimentation sur l’affichage environnemental des produits alimentaires initiée par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (loi n°2020-105).
1.2. APIS-GENE : La génomique pour accompagner les filières dans la transition agroécologique.
Fondée en 2003 sous l’impulsion des filières de ruminants dont INTERBEV, APIS-GENE vise à développer la compétitivité des filières par la mise en œuvre sur le terrain des avancées technologiques des travaux de recherche en génomique qu’elle finance. Ces travaux ont été présentés par Mathieu Diribarne d’APIS-GENE.
Fer de lance, la Sélection Génomique permet à partir du génome de prédire les performances d’un animal dès son plus jeune âge. Issue de 10 années de R&D menées par INRAE, Idele et Allice et principalement soutenues par APIS-GENE, elle est une réalité terrain, largement déployée en bovins laitiers et en constante progression en bovins allaitants. Ce pari technologique et scientifique devenu chaînage opérationnel constitue une plateforme qui participe à répondre aux priorités filières dont la transition agroécologique.
La génétique apporte parfois une réponse complète. Cela est le cas pour les mutations causales responsables d’anomalies bovines, qui, lorsqu’elles sont transmises par deux parents porteurs induisent inexorablement malformations, improductivité, mal-être et souvent mortalité. Les travaux de R&D (projet BOVANO) déployés sur le terrain permettent de suivre et gérer plus de 30 anomalies (e.g. veaux paillasson, épidermolyse bulleuse…), améliorant santé et bien-être des animaux.
Le plus souvent, la génétique explique une part du caractère et est modulée par l’environnement dont les conditions d’élevages. Des travaux en cours visent à mieux identifier des jeunes animaux robustes face aux maladies respiratoires et diarrhéiques les plus courantes (projet Healthycalf). Ecarter via la sélection les animaux plus sensibles permettrait de réduire les intrants médicamenteux. Dans la même veine, l’identification d’animaux résistants aux lésions de myosite éosinophilique devrait permettre de limiter le nombre d’animaux saisis à l’abattoir (projet GMyosEo2).
Enfin, 6 années de travaux du projet Beeaflim ont permis de montrer le potentiel de la génétique pour améliorer l’efficacité alimentaire. Demain, via une simple prise de sang il sera possible d’estimer, de sélectionner et d’améliorer les animaux sur leur potentiel, conduisant à une meilleure valorisation de la ration, une économie de ressources et une baisse de la compétitivité feed/food. Des premiers liens entre efficience alimentaire et émissions de GES d’une part et précocité d’autre part devront être approfondis.
La génétique est un levier puissant dont les approches toujours plus intégratives contribueront à répondre aux défis de nos filières.
Cinétique de l’évolution de l’antibiorésistance chez le veau de boucherie.
La résistance aux antibiotiques est une problématique de santé publique, connue en médecine humaine depuis plus de 60 ans, a expliqué Jean-Yves Madec, de l’ANSES. L’usage des antibiotiques en agriculture conduit aussi à considérer cet enjeu comme prioritaire chez l’animal. D’après les données de surveillance, la problématique se pose en filière veau de boucherie. Compte tenu de cette situation, l’Anses a conduit avec INTERBEV dès 2013 une étude afin de caractériser la cinétique d’évolution de l’antibiorésistance au cours de l’engraissement des veaux de boucherie. Depuis 2019, les travaux se poursuivent à travers la cinétique d’acquisition de l’antibiorésistance des veaux de boucherie au cours des différentes étapes depuis l’élevage naisseur jusqu’aux ateliers d’engraissement pour identifier son origine et les facteurs influençant sa dissémination.
La finalité de ces travaux (prévu en 2022) sera d’identifier des leviers d’amélioration des pratiques et diminuer le niveau d’antibiorésistance dans cette filière.
Association des composés néoformés issus de la cuisson des viandes et des fibres alimentaires sur le risque du cancer du côlon.
Dans le cadre des recherches visant à étudier l’impact des produits néoformés issus des traitements thermiques de la viande sur le développement du cancer du côlon, les effets de 2 familles de molécules, les AAHs (Amines hétérocycliques Aromatiques) et les HAPs (Hydrocarbures Amines Hétérocycliques) ont été testés. Les résultats du projet ont été exposés par Michèle Sabbah, de l’Inserm et Latifa Najar d’Idele. Les effets de ces molécules ont été étudiées seules ou en association avec du butyrate mimant une fibre alimentaire, dans le cas de l’étude in vitro seules ou en association avec de l’inuline comme fibre alimentaire sur des souris in vivo. L’ensemble de ce travail a montré i) In vitro que ces molécules n’induisent pas d’effet prolifératif et n’empêchent pas l’effet protecteur des fibres sur le côlon ii) In vivo, que les HAPs influent négativement sur la prise de poids des animaux, la diminution de la longueur du côlon et l’apparition de quelques masses palpables caractérisées par un tissu inflammé. Cet effet négatif des HAPs est annulé par l’inuline pour les paramètres poids et la longueur du côlon.
Ces résultats suggèrent que les fibres pourraient avoir un rôle protecteur par réduction de l’inflammation colique en retardant l’apparition des lésions cancéreuses et témoignent de l’importance d’avoir un régime alimentaire équilibré (protéines animales, protéines végétales).
VI. CONCLUSION
INTERBEV s’engage chaque année dans de nombreux programmes et partenariats de recherche. Au travers des Matinales de la Recherche, I'Interprofession Elevage et Viande souhaite partager et diffuser quelques-uns de ses travaux et résultats emblématiques. Compte tenu du succès renouvelé de cette édition, la manifestation scientifique devrait être reconduite en 2023.
Références bibliographiques :