Microbiologie du tube digestif ante et post mortem et impact sanitaire d’une éviscération retardée sur la qualité microbiologique des viandes.
Cet article de synthèse fait un bilan des connaissances du microbiote digestif des animaux de boucherie et de son évolution après l’abattage, en vue d’évaluer l’impact d’une éviscération retardée sur la qualité microbiologique de la viande.
I. INTRODUCTION
Plus de 1000 abattoirs d’animaux de boucherie (bovins, ovins, caprins, porcins et équins) ont fermé sur le territoire français depuis 1970. On en dénombrait 268 en 2018 principalement répartis dans l’ouest de la France, contre 3 500 en Allemagne, 3 200 en Autriche ou encore 1 600 en Italie. Dans les zones rurales, les abattoirs commerciaux sont parfois éloignés de plusieurs centaines de kilomètres des exploitations agricoles. Le transport, le mélange d’animaux issus de différentes exploitations et le changement d’environnement représentent des sources de stress importants, ce qui nuit au bien-être animal et peut affecter sensiblement la qualité de la viande (Terlouw et al., 2015). Ce constat a conduit les acteurs des filières courtes à solliciter des solutions alternatives à l’abattage conventionnel. Le développement de circuits courts, où les carcasses sont désossées, la viande transformée et les produits commercialisés sur le site d’élevage ou à proximité, est venu renforcer ces besoins.
Pour répondre à cette sollicitation, l’État français a autorisé en 2018, par l’article 73 de la loi EGalim, l’expérimentation sur les méthodes d’abattage alternatives, soumises à la même règlementation européenne que les abattoirs conventionnels. En effet, les abattoirs pour ongulés domestiques doivent impérativement être agréés et répondre aux mêmes exigences, qu’il s’agisse de structures fixes ou mobiles. Cependant le Règlement (CE) n° 1099/2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort prévoit la possibilité de dérogations nationales pour pouvoir s’adapter à l’utilisation d’abattoirs mobiles. A titre d’exemple, en Belgique, l'autorité sanitaire a publié une circulaire relative à l’agrément et au fonctionnement des abattoirs et ateliers de découpe mobiles qui permet des assouplissements par rapport aux abattoirs conventionnels.
Le caisson d’abattage, une remorque dotée d’un système d’étourdissement et d’un treuil vertical, est l’une des solutions envisagées (Astruc & Terlouw, 2023, CP-PACA, 2020). L’étourdissement et la saignée sont effectués dans le caisson d’abattage situé sur le site d’élevage, et les animaux sans vie sont ensuite transportés à l’abattoir pour les étapes suivantes de l’abattage, incluant l’habillage (bovins, ovins, caprins) ou l’échaudage (porcs, volailles), l’éviscération, la fente et le refroidissement des carcasses. Or, le règlement 853/2004 du parlement européen précise que les étapes de l’abattage qui suivent la saignée, et en particulier l’éviscération « doivent être effectuées sans retard indu et de manière à éviter toute contamination des viandes » (Parlement Européen, 2004). Cependant, aucune information précise de délai n’est mentionnée, excepté pour les cas d’abattage d’urgence et pour l’abattage d’animaux dont le transport à l’abattoir présente un risque pour les manipulateurs ou pour eux-mêmes. Si, dans ces deux cas, plus de deux heures s’écoulent entre le moment de l’abattage et l’heure d’arrivée à l’abattoir, les carcasses en peau doivent être réfrigérées pendant le transport (chapitres VI et VI bis de l’annexe III du règlement 853/2004).
La perspective d’utilisation de caissons d’abattage nécessite donc de s’assurer que le retard d’éviscération induit par le temps de transport de l’animal sans vie jusqu’à l’abattoir, n’engendre aucun risque de contamination microbiologique ou d’altération organoleptique conformément aux règlements du Parlement Européen et du Conseil du 29 avril 2004 853/2004 et de la Commission Européenne 1441/2007.
Cette revue bibliographique décrit les systèmes digestifs des mammifères, les mécanismes connus de la translocation bactérienne in vivo et post mortem, et dresse un état des lieux de l’effet du retard de l’éviscération sur la charge microbiologique des carcasses. Bien que, selon l’espèce considérée, l’appareil digestif puisse contenir divers micro-organismes incluant des bactéries, des champignons et des protozoaires (Dusart, 2014), cette revue se restreint aux bactéries, les seules à faire l’objet de réglementations spécifiques relatives à l’hygiène et à la sécurité sanitaire des aliments.
II. ANATOMIE COMPAREE DU SYSTEME DIGESTIF DES ANIMAUX DE BOUCHERIE
La partie gastro-intestinale du tractus digestif est maintenue par le péritoine constitué d’une membrane qui s’étend sur l’abdomen, le pelvis et les viscères, et délimite la cavité péritonéale. Chaque espèce présente des longueurs et volumes relatifs différents pour chaque segment du tube digestif, adaptés à leur régime alimentaire. Parmi les animaux de boucherie, on distingue les espèces monogastriques (équins et porcins), des espèces polygastriques comprenant les ruminants (bovins, caprins, ovins). Un animal monogastrique possède un estomac simple alors qu’un animal polygastrique possède un estomac complexe à trois (on parle de pseudo-ruminant) ou quatre compartiments (ruminant) (Figure 1). Lors de la digestion, les éléments nutritifs (lipides, protéines, glucides, sels minéraux…) passent dans le sang et vont alimenter les différents organes pour assurer les fonctions vitales de l’animal (croissance, entretien, besoins énergétiques…).
Chez les ruminants, les quatre parties de l’estomac sont le rumen (ou panse), le réseau (réticulum ou bonnet), le feuillet (omasum) et la caillette (abomasum) (Hofmann, 1993; Dusart, 2014). Les trois premiers compartiments forment les pré-estomacs. La muqueuse de chacun d’eux est épaisse et adaptée à leurs fonctions respectives (Hofmann, 1993). Le rumen, qui représente 90% du volume du pré-estomac, est le principal lieu d’activité des micro-organismes anaérobies (Hofmann, 1993). La caillette est le lieu de la sécrétion d’acide chlorhydrique et de pepsinogène permettant la digestion des protéines ayant échappé à la fermentation ruminale. L’estomac est plus ou moins spécialisé en fonction des espèces. Les bovins et les ovins ont un estomac plus adapté à la digestion des fibres que celui du cerf, de la chèvre, ou encore du chevreuil qui sont également des polygastriques (Hofmann, 1993).
Les intestins ont pour principale fonction de poursuivre la dégradation enzymatique et bactérienne, ainsi que l’absorption des aliments préalablement digérés dans l’estomac. Ils sont différenciés entre intestin grêle et gros intestin. L’intestin grêle commence avec le duodénum, où sont digérées les graisses par l’action des sucs pancréatiques et de la bile. Viennent ensuite le jéjunum et l’iléon qui précèdent le gros intestin. L’insertion latérale de l’iléon dans le gros intestin se prolonge par le colon, le rectum et l’anus. Les intestins contiennent un grand nombre de bactéries et sont le siège d’une fermentation bactérienne importante.
Figure 1 : Différence majeure entre systèmes digestifs monogastrique et polygastrique :
Les monogastriques possèdent un estomac simple alors que les polygastriques ont un estomac composé de 4 compartiments incluant le rumen, le réseau, le feuillet et la caillette.
(https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/estomac/49509 et https://fr.freepik.com/vecteurs/estomac)
III. LE MICROBIOTE DIGESTIF IN VIVO
Les micro-organismes du tube digestif comprennent des bactéries et des protozoaires, et dans une moindre mesure des champignons, des archées et des virus. Leurs rôles sont multiples au niveau de la nutrition (Zened et al., 2020) et de la santé (Nicola et al., 2017) de l’animal. Ils produisent des hydrolases qui interviennent dans la dégradation de l’aliment. Ils sont impliqués dans la défense contre les pathogènes et les toxines, et dans le développement et le maintien du système immunitaire (Bischoff et al., 2014). Le microbiote joue un rôle de barrière en empêchant les bactéries pathogènes de s’implanter (Calenge et al., 2014). L’essor du séquençage de nouvelle génération a permis d’explorer la métataxonomie, la métagénomique et la métatranscriptomique afin d’identifier les gènes présents et transcrits, et de déduire les fonctions potentielles associées (Zened et al., 2020). Le développement de la métaprotéomique permettra d’identifier les protéines réellement synthétisées par le microbiote digestif (Honan & Greenwood, 2020).
3.1. Le microbiote digestif des monogastriques
Chez les monogastriques, le microbiote digestif se concentre au niveau intestinal. Il est composé à 98% de bactéries appartenant majoritairement aux phyla Bacillota (anciennement Firmicutes) et Bacteroidota (anciennement Bacteroidetes) (Holman et al., 2017 ; Mesa et al., 2017). Les 2% restants sont répartis entre d’autres phyla. La composition du microbiote intestinal varie selon la localisation dans le tractus digestif. Les genres Lactobacillus et Clostridium sont majoritaires dans l’intestin grêle alors que les Prevotella sont majoritaires dans le gros intestin (Crespo-Piazuelo et al., 2018). Le côlon est le site du tube digestif où l’on retrouve la plus forte densité bactérienne avec 1010 bactéries par gramme de contenu digestif (Apajalahti, 2005). L'estomac peut contenir des micro-organismes adaptés aux conditions acides, dont des Enterobacteriaceae, Lactobacillaceae et Streptococcaceae (Ducluzeau & Raibaud, 1975 ; Carron, 2017). Des perturbations extérieures telles que le changement brutal d’alimentation, ou la modification du statut sanitaire de l’élevage font varier le microbiote intestinal. Le microbiote a un rôle majeur dans la production d’acides gras volatils à partir des glucides, en grande partie absorbés au niveau du gros intestin (Abolbaghaei et al., 2018). Chez le porc en particulier, certaines bactéries ancrées dans la muqueuse intestinale stimulent la maturation des lymphocytes (Rolhion & Chassaing 2016). Certaines bactéries sont également capables de détoxifier des mycotoxines présentes dans les aliments et d’autres sont capables de dégrader les acides biliaires non réabsorbés dans l’iléon (Jones et al., 2008 ; Ramírez-Pérez et al., 2017).
3.2. Le microbiote digestif des polygastriques
Chez les ruminants, le microbiote dépasse les 1016 cellules vivantes, incluant jusqu’à 1011 bactéries par gramme de contenu ruminal chez la vache (Apajalahti, 2005). On dénombre 7000 espèces de bactéries, appartenant majoritairement aux phyla Bacillota, Bacteroidota et Proteobactéria, et plus particulièrement les genres Prevotella, Clostridium, Butyrivibrio, Anaerovibrio, Ruminococcus, Succiniclasticum, Pseudobutyrivibrio et Mogibacterium (Chaucheyras-Durand & Ossa, 2014, Zened et al., 2020). Les bactéries couvrent la majorité des fonctions métaboliques existantes dans le rumen. Les bactéries, protozoaires et champignons fermentent les aliments et les dégradent en acide gras et CO2. Les archées synthétisent du méthane à partir de CO2 et H2 produit par les autres microbes (Zened et al., 2020). Les virus, essentiellement des phages participent probablement au recyclage des nutriments et à la régulation des populations par leur activité de lyse (Gilbert et al., 2020). Les conditions physico-chimiques du tube digestif, et notamment celles du rumen (pH, teneur en eau, potentiel redox, taux de CO2 et CH4) sont favorables au développement d’une population microbienne anaérobie, majoritaire dans l’ensemble du tube digestif des polygastriques.
Le microbiote est aussi présent dans d’autres parties du tube digestif, en particulier le caecum et le côlon. Ce sont, globalement, les mêmes genres de bactéries que l’on retrouve tout au long du tractus digestif des polygastriques, bien que moins diversifiées et moins nombreuses que dans le rumen (Zened et al., 2020). Les mêmes genres bactériens sont présents chez les polygastriques, mais en proportions variables selon l’espèce ou la race. Par exemple, les vaches ont une plus grande proportion de Succiniclasticum, Ruminococcus, et Fibrobacter que les chèvres (Jami & Mizrahi, 2012) ; et les buffles ont davantage de bactéries cellulolytiques, protéolytiques et amylolytiques ruminales que les vaches (Bertoni et al., 2020). L’environnement, l’alimentation, l’âge des animaux et le stress peuvent également faire varier le microbiote digestif (Holman & Gzyl, 2019 ; Kim et al., 2022 ; Snelling et al., 2019).
IV. LA PAROI DU TUBE DIGESTIF IN VIVO
Aussi bien chez les monogastriques que chez les polygastriques, les parois de la cavité buccale et de l’œsophage ne permettent pas l’absorption mais seulement le transit du contenu digestif et la sécrétion de métabolites (Yen, 2001). La paroi gastro-intestinale est composée de 4 couches : la muqueuse, la sous-muqueuse , la couche musculaire (ou musculeuse), et le tissu conjonctif (ou séreuse) en partant de la lumière vers l’extérieur du tube digestif (Figure 2).
Figure 2 : Anatomie de la paroi intestinale
(https://cancer.ca/fr/cancer-information/cancer-types/small-intestine/what-is-small-intestine-cancer/the-small-intestine)
La muqueuse est délimitée par un épithélium à l’interface entre le contenu intestinal et le système circulatoire de l’animal. Il s’agit de la voie d’entrée du contenu digestif vers l’intérieur de l’animal (Genser, et al., 2016). Les types de cellules composant cet épithélium, ainsi que l’épaisseur de chacune des couches de la paroi varient tout au long du tube digestif
(Tableau 1). L’épithélium digestif peut être composé d’une ou plusieurs couches (épithélium simple ou stratifié). Il est constitué en majorité de cellules aplaties (pavimenteuses) ou de cellules en forme de cylindres (prismatiques). L’épithélium repose sur un tissu conjonctif irrigué et innervé (Yen, 2001), formant la base de la muqueuse : la lame basale, ou lamina propria.
Tableau 1 : Les différents types d’épithéliums digestifs
(Church, 1993; Hofmann, 1993; Yen, 2001; Stevens & Hume, 2004; Nzalak, 2010)
4.1. La paroi de l’estomac des animaux monogastriques
Chez les monogastriques, quatre zones se succèdent dans l’estomac ; chacune avec un épithélium différent (Yen, 2001; Stevens & Hume, 2004). La première a une paroi similaire à celle de l’œsophage, c’est la zone œsophago-gastrique. La seconde, la zone cardiaque, a des cellules épithéliales sécrétant mucus, lipases et protéases. La troisième est la zone fundique, avec des cellules épithéliales à mucus (sécrétant mucus et protéases), des cellules oxyntiques (produisant de l’acide chlorhydrique), et des cellules chef (qui sécrètent des protéases). Enfin la zone pylorique a un épithélium avec les mêmes cellules chef et cellules à mucus que la zone fundique, bien que les cellules à mucus soient ici majoritaires (Yen, 2001). Les cellules à mucus de la zone pylorique sécrètent du HCO3 en plus du mucus, ce qui les protège de l’acide chlorhydrique sécrété en amont (Stevens & Hume, 2004). Cependant, elles occupent une surface relative très différente d’une espèce à l’autre. Par exemple, chez le porc, les zones cardiaques et fundiques sont les plus étendues, alors que pour le cheval c’est la zone œsophago-gastrique qui prédomine (Stevens & Hume, 2004).
4.2. La paroi de l’estomac des animaux polygastriques
Chez les polygastriques, les pré-estomacs ont un épithélium adapté à l’activité mécanique lors du transfert des éléments solides encore peu dégradés. En effet, il est stratifié et kératinisé, le protégeant des éléments grossiers tout en assurant leur transport et l’absorption des acides gras volatils, produits de dégradation des fibres et des glucides par les micro-organismes (Hofmann, 1993 ; Dusart, 2014). De plus, la structure et la composition de l’épithélium de la paroi participent à la protection de l’organe contre la migration de bactéries pathogènes. La paroi du rumen se distingue par le fait qu’elle est recouverte de papilles ruminales, excroissances constituant une très grande surface d’absorption et irriguée par des veinules (Storm et al., 2012).
Le réseau a une paroi stratifiée kératinisée à l’apparence alvéolée. Les différents niveaux d’alvéoles sont délimités par des crètes contractiles (Dusart, 2014) permettant, à la manière d’un filtre, la séparation entre les particules solides de différentes tailles et les liquides. La contraction du rumen et surtout du réseau est à l’origine de la rumination et du brassage des aliments ingérés.
La paroi du feuillet est étendue et prend la forme de filtre absorbant l’eau ingérée et ses électrolytes (Dusart, 2014 ; Hofmann, 1993). Cette paroi a pour particularité de contenir trois couches de muscles. Elle retient les grosses particules qui migrent ensuite vers la caillette (Hofmann, 1993).
L’épithélium de la caillette est comparable à celui de l’estomac des monogastriques. Il contient des glandes sécrétrices d’enzymes digestives, et des extensions pariétales en forme de feuillets spiralés qui rétrécissent et deviennent de plus en plus pyloriques au fur et à mesure qu’on se dirige vers l’aval (Hofmann, 1993). On distingue les mêmes zones fundiques et pyloriques que dans l’estomac des monogastriques (Dusart, 2014; Yen, 2001).
4.3. La paroi des intestins
La paroi intestinale forme des excroissances appelées villosités, et des replis appelés cryptes. Les cellules épithéliales sont agencées en une seule couche, et sont reliées entre elles par des jonctions serrées et des desmosomes pour augmenter la résistance mécanique des cellules (Genser et al., 2016). L’épithélium intestinal est recouvert de mucus. Il est composé majoritairement d’entérocytes avec des microvillosités au niveau apical afin de démultiplier les échanges. L’épithélium contient également des cellules de Paneth, des cellules à mucus et des cellules endocrines. Du côté basal, des cellules immunitaires sont présentes (macrophages, lymphocytes et plasmocytes sécrétant les immunoglobulines A) ainsi que des peptides anti-microbiens (Genser et al., 2016). Certains lymphocytes et cellules dendritiques sont capables de traverser l’épithélium (Yen, 2001; Genser et al., 2016). La paroi du côlon est lisse et constituée majoritairement de cellules épithéliales productrices de mucus réduisant la perméabilité de la paroi (Genser et al., 2016; Yen, 2001).
4.4. Une paroi à perméabilité sélective
La paroi digestive assure la première barrière immunitaire contre les pathogènes tout en laissant passer les nutriments et quelques bactéries du microbiote (Bischoff et al., 2014). Le mucus recouvrant la paroi de l’estomac glandulaire et intestinale, empêche l’adhérence des bactéries et ainsi les mécanismes de transfert (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017). La perméabilité de l’épithélium intestinal diminue du duodénum au côlon (Genser, et al., 2016) alors que l’épaisseur de mucus augmente (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017). Le développement du microbiote permet également de limiter le développement d’autres bactéries pouvant être pathogènes (Wiest & Rath, 2003).
Dans les intestins, les jonctions serrées modulent principalement l’entrée d’eau, d’ions et de molécules de 6 à 60 Å (Genser et al., 2016). Le contenu intestinal peut aussi traverser la paroi par des pores accessibles aux particules de moins de 10 Å, par des canaux sélectifs, ou encore au travers de lésions qui se créent à la mort des cellules épithéliales (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020; Genser et al., 2016).
V. LA TRANSLOCATION BACTERIENNE
L’expression « translocation bactérienne » proposée par Berg et Garlington en 1979 est définie comme le passage au travers de l’épithélium intestinal, de bactéries vivantes ou non, ou de leurs métabolites de sécrétions. Une fois l’épithélium franchi par transcytose ou via les jonctions serrées (voie paracellulaire) après reconnaissance par les entérocytes, les bactéries atteignent les ganglions lymphatiques mésentériques voire d’autres organes comme la rate ou le foie (Berg & Garlington, 1979; Plantefève & Bleichner, 2001). Elles peuvent aussi migrer dans le système sanguin par la veine porte. Toutefois, la diffusion par le système lymphatique semble être plus fréquente que la diffusion par le sang (Plantefève & Bleichner, 2001). Chez un individu sain, les bactéries ne peuvent pas aller plus loin que les ganglions lymphatiques mésentériques, où les macrophages présents les éliminent (Dahlinger, Marks, Hirsh, 1997 ; Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020; Wiest & Rath, 2003). En passant par la veine porte, elles sont également éliminées dans le foie avant d’atteindre la circulation systémique (Krentz & Allen, 2017). Des bactéries pathogènes peuvent migrer de l’intestin vers l’utérus via le sang et causer des métrites chez des vaches laitières (Jeon et al., 2018). Des bactéries oralement consommées par des femmes allaitantes ont été retrouvées dans leur lait, suggérant que le microbiote intestinal de la mère est transmis à l’enfant via le lait maternel (Moossavi & Azad, 2020, Selma-Royo, Calvo Lerma, Cortes-Macias & Collado, 2021). Des bactéries anaérobies comme aérobies peuvent traverser la paroi digestive. Ce processus physiologique est amplifié lors d’évolutions physiopathologiques à l’origine d’inflammations voire de septicémies chez l’humain (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020; Mesli, Neut, & Hedouin, 2017). La grande majorité des travaux publiés s’appuient sur l’humain ou la souris. Toutefois, la translocation bactérienne a également été évoquée chez le porc (Seidler, Alter, Krüger, & Felhaber, 2001) et les ruminants (Fu et al., 2022).
5.1. Lien entre translocation bactérienne et immunité
Les bactéries commensales contribuent à la mise en place de mécanismes qui inhibent la translocation bactérienne et participent à la maturation du système immunitaire (Genser et al., 2016). Le microbiote intestinal renforce l’effet barrière de la paroi intestinale en induisant la production de mucus, d’IgA, de défensines et la synthèse de protéines de la jonction serrée par les entérocytes (Genser et al., 2016). La translocation bactérienne initierait la production d’anticorps et améliorerait ainsi la mémoire immunitaire (Plantefève & Bleichner, 2001). Certaines bactéries commensales, une fois dans les tissus lymphoïdes, peuvent induire la sécrétion d’interleukines par les cellules dendritiques, facilitant la colonisation bactérienne des tissus lymphoïdes, où les bactéries sont éliminées par les macrophages (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020).
5.2. Les facteurs de translocation bactérienne in vivo
Facteurs de translocation dans des conditions normales de fonctionnement du tube digestif
La translocation bactérienne est modulée par la taille de la bactérie, le facteur de virulence et la présence d’antigènes reconnus par les entérocytes qui permettent une transcytose (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020). Certaines cellules comme les cellules dendritiques CD103+ ou les macrophages CXCR3R1+ ont des extensions qui traversent la paroi et prélèvent du contenu de la lumière intestinale sans occasionner de dommage à l’épithélium (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020).
Induction de la translocation par des facteurs externes ou physiopathologique
La translocation peut être induite par plusieurs facteurs exogènes (Tableau 2) : des radiations, des facteurs épigénétiques, l’alcool, une hyperglycémie, une ischémie, un infarctus du myocarde … (Bischoff et al., 2014 ; Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020). De plus, la translocation bactérienne est facilitée par l’altération physique de l’épithélium intestinal (lésions épithéliales par exemple) ou par une déficience du système immunitaire (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020 ; Wiest & Rath, 2003 ; Plantefève & Bleichner, 2001). Il a été montré que les pancréatites et les péritonites conduisent à des atteintes des défenses immunitaires et à des lésions tissulaires favorables aux translocations (Plantefève & Bleichner, 2001). Les chocs hémorragiques et des manipulations de laboratoire (manipulations intestinales préopératoires, alimentation parentérale ou entérale, ligature du cholédoque acheminant la bile…) favorisent la translocation (Plantefève & Bleichner, 2001). La réduction de l’acidité gastrique, du flux intestinal (et donc l’allongement du délai de transit du chyme) peut provoquer une prolifération du microbiote digestif. De plus, lorsqu’une population de bactéries se développe au-delà d’un certain seuil, sa probabilité de translocation augmente, notamment pour les entérobactéries (Plantefève & Bleichner, 2001 ; Wiest & Rath, 2003). Chez le porc, un transport de 7 à 8 h ou une température ambiante de 40 °C augmenterait les taux de catécholamines et de glucocorticoïdes qui favoriseraient la translocation bactérienne (Seidler, Alter, Krüger, & Felhaber, 2001).
5.3. Effets de la translocation bactérienne
Les conséquences de la translocation bactérienne sont mal connues. La translocation pourrait causer des infections localisées voire systémiques, mais seulement dans des situations de translocation massive, avec un dépassement des systèmes de défense et avec des bactéries très virulentes (Plantefève & Bleichner, 2001). Chez l’humain, les complications infectieuses postopératoires sont plus fréquentes chez les patients présentant un niveau élevé de translocation bactérienne (Plantefève & Bleichner, 2001). Chez la souris, la translocation d’E. gallinarum cause l’induction de maladies auto-immunes (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020). La translocation de bactéries Enterococcus est observée chez des humains ou des souris atteints de maladies du foie, ayant eu un arrêt cardiaque, une infection du pancréas, une maladie inflammatoire des intestins, un cancer ou ayant subi une transplantation de cellules souches hématopoïétiques (Fine, Vieira, Gilmore, & Kriegel, 2020 ; Bischoff et al., 2014). Le lien de causalité entre la translocation et ces maladies n’est pas clairement établi, la translocation constituerait plutôt un facteur aggravant.
Tableau 2 : Exemples de conditions de translocation de certains micro-organismes
VI. LA MICROBIOLOGIE ET LA PHYSIOLOGIE DU TUBE DIGESTIF POST MORTEM
Dès la mort, la circulation sanguine s’arrête, et les tissus biologiques ne sont plus alimentés en nutriments ni en oxygène. Les cellules vont survivre quelque temps en utilisant un métabolisme anaérobie qui entraine une accumulation des déchets métaboliques et de protons dans les cellules provoquant leur autolyse (Tsokos, 2005). La dégradation de l’intestin grêle commence 10 minutes après la mort chez le veau, détruisant les villosités et leur épithélium. L’épithélium du rumen et du feuillet se dégrade dans les 20 minutes post mortem (McInnes, 2015), et le mucus n’est plus produit après la mort. L’autolyse libère le contenu cellulaire, majoritairement composé de protéines, mais aussi des carbohydrates et lipides utilisables par les bactéries commensales digestives (Tsokos, 2005).
L’autolyse est suivie de la putréfaction définie comme la dégradation des contenus cellulaires par les bactéries commensales anaérobies (en majorité par les bactéries anaérobies du tube digestif) (Campobasso, Di Vella, & Introna, 2001). Elles produisent des gaz comme le méthane, le dioxyde de carbone, le sulfure d’hydrogène, l’ammoniaque, le mercaptan ou des amines primaires, mais aussi de l’acide propionique, butyrique et lactique (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017 ; Tsokos, 2005). Cette production de gaz provoque le gonflement du tractus intestinal. En parallèle, l’abaissement de la température corporelle rend les enzymes sécrétées par l’animal de moins en moins actives, contrairement à celles des bactéries qui agissent à un éventail de température plus large. L’activité relative des bactéries est donc aussi favorisée par le refroidissement corporel (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017). Les bactéries anaérobies, protéolytiques sont actives à température ambiante et prolifèrent après la mort, à l’instar des genres Proteus et Clostridium ou Enterococcus (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017 ; Tsokos, 2005; Hyde, Haarmann, Lynne, Bucheli, & Petrosino, 2013), ou de manière plus générale les Bacillota (Hyde, Haarmann, Lynne, Bucheli, & Petrosino, 2013). Les premiers signes de putréfaction observables à l’extérieur du corps apparaissent chez les mammifères dans les 24 h post mortem (Brooks, 2016). Un verdissement de la peau de l’abdomen est une conséquence de la réaction entre l’hémoglobine et le sulfure d’hydrogène produit par des bactéries commensales digestives (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017 ; Tsokos, 2005). Les différentes étapes de transformation post mortem peuvent être simplifiées comme suit : état frais, état gonflé, état décomposé, puis état sec. Nous nous concentrerons ici sur l’état frais et la transition avec l’état gonflé (Tableau 3), soit sur les 60 premières heures post mortem ou s’enchainent l’autolyse des cellules, la putréfaction, le verdissement et le gonflement du corps (Brooks, 2016). En effet, dans le cadre de l’abattage utilisant des caissons, le délai entre mort et éviscération n’a pas vocation à dépasser quelques heures.
Tableau 3 : Principales étapes macroscopiques et microscopiques post mortem lors des 60 premières heures de décomposition à 20 °C avec un faible taux d’humidité
(adapté de Brooks, 2016 ; Almulhim & Menezes, 2020)
La vitesse de décomposition dépend, entre autres, de l’environnement (température et la présence des insectes), de la masse du corps, de l’espèce, et de l’organe considéré (Almulhim & Menezes, 2020 ; Brooks, 2016). Le gonflement de la dépouille est très dépendant du délai post mortem et de la température extérieure (Tableau 4). Par exemple, dans le cas de carcasses de porcs stockées à 13 °C, le gonflement est peu visible 24 heures après la mort, même au niveau de l’abdomen (Iancu, Carter, Junkins, & Purcarea, 2015). Le gonflement de la dépouille démarre plus tôt et dure plus longtemps pour des porcs lourds comparativement à des porcs légers (Matuszewski, Konwerski, Frątczak, & Szafałowicz, 2014). Ces auteurs attribuent cette différence au refroidissement plus lent et à un microbiote plus important et plus varié chez les porcs lourds. Cependant, le gonflement et les marqueurs de décomposition des dépouilles n’étaient observés au plus tôt qu’à 2 jours post mortem.
Tableau 4 : Conditions et délai post mortem à partir duquel un gonflement des cadavres de différentes espèces est observé
La bile s’écoule du foie vers le tube digestif dans les heures qui suivent la mort (McInnes, 2015). Elle se déverse partiellement dans le duodénum, plus rapidement chez les polygastriques que chez les monogastriques dont les gaz intestinaux sont libérés plus lentement et exercent une contre pression (Gill & Penney, 1982). Le gonflement du tube digestif augmente la pression dans le corps tant que la peau reste intacte. Les liquides habituellement contenus dans les organes ou issus de la décomposition sont purgés par les orifices corporels pendant la phase de gonflement, entre 72 h et 96 h post mortem chez l’humain et le sanglier (Pereira Leite et al., 2019 ; Brooks, 2016). Le tube digestif gonflé est susceptible d’augmenter le risque d’accident lors de l’éviscération (Casoli, Duranti, Cambiotti, & Avellini, 2005 ; Gill, 2007 ; Ramanzin et al., 2010). Toutefois, un équipement adéquat permet d’effectuer l’éviscération de manière hygiénique, sans risque de contamination de la viande (Van Heerden, 2016).
VII. LA TRANSLOCATION BACTERIENNE POST MORTEM
La mort provoque la fin de la régulation des fonctions vitales et des systèmes de défense contre les bactéries commensales, ce qui est supposé faciliter leur translocation vers les tissus environnants. Cependant, il faut 48 h aux cellules immunitaires pour se décomposer (Penttilä & Laiho, 1981) ce qui pourrait ralentir la translocation bactérienne dans ce délai. Le verdissement apparaissant 18 h post mortem au niveau de la peau proche de l’iléon est une conséquence de la dégradation du sang par les bactéries commensales digestives où elles produisent un enchainement de réactions aboutissant au verdissement de l’hémoglobine (Mesli, Neut, & Hedouin, 2017) et à la production d’acide formique dont la teneur augmente sensiblement à partir de 48 h post mortem (Donaldson & Lamont, 2013).
Gill et al. (1978) ont montré que les bactéries intestinales protéolytiques mettent au moins 16 h à franchir la paroi intestinale de cochon d’inde avec des températures ambiantes comprises entre 10 et 30 °C. Toutefois, dans cette étude, un morceau de paroi intestinale a été prélevé et inoculé hors de l’organisme, et ne prend pas en compte l’interaction entre les bactéries et l’entièreté du système immunitaire destiné à neutraliser les bactéries (Gill, Penney, & Nottingham, 1978). Chez la souris des bactéries commensales du genre Lactobacillus sont retrouvées dans le sang cardiaque, la rate et les reins dans les 5 minutes post mortem (Heimesaat et al., 2012). Cependant, le taux de bactéries est dépendant de l’organe considéré, et l’étude révèle une importante variabilité de la présence de bactéries en fonction du temps post mortem de prélèvement (Heimesaat et al., 2012). Par exemple, 40 % des échantillons de sang cardiaque prélevés 30 minutes après la mort révèlent des bactéries commensales majoritairement anaérobies (Lactobacillus, Enterococcus, E. coli, Bactéroïdes, Prevotella, Clostridium) alors que 12 h après la mort, elles ne sont plus détectées (toujours dans le sang cardiaque). Cette variabilité peut refléter l’hétérogénéité de la durée de fonctionnement du système immunitaire. Il est à noter que les bactéries les plus détectées trois heures après la mort dans le foie, la rate, les reins, le sang cardiaque et les ganglions lymphatiques mésentériques des souris sont des bactéries commensales des genres Lactobacillus et Enterococcus (Heimesaat et al., 2012). Toujours chez la souris, les premières bactéries à migrer depuis le tube digestif sont des staphylocoques, puis les coliformes et les bactéries anaérobies (Melvin, Cronholm, Simson, Isaacs, 1984). Chez l’humain, Clostridium est détecté 24 h après la mort, et Streptococcus après 5 jours. De manière générale, des bactéries de plusieurs genres sont présentes dans 60 % des échantillons de sang après 18 h post mortem (Tuomisto, Karhunen, Vuento, Aittoniemi, & Pessi, 2013).
7.1. L’éviscération retardée de plus de 20h
Des études ont été menées depuis les années 1970 pour caractériser les effets de l’éviscération retardée sur la migration des bactéries commensales en majorité sur des espèces de gibier (Tableau 5). Pour tenter de transposer ces résultats au contexte de l’abattage d’animaux de boucherie, les similitudes physiologiques et microbiologiques entre sanglier et porc, des monogastriques du même genre d’une part, et entre chamois, cerf, chevreuil, gnou et bovins, ovins et caprins, des ruminants polygastriques, appartenant à la famille des cervidés ou des bovidés d’autre part, ont été exploitées.
Les travaux de Gill et ses collaborateurs sont fondateurs sur l’éviscération retardée. Ces auteurs soulignent que les entérobactéries commensales, qu’elles soient aérobies ou anaérobies, sont absentes des muscles et des ganglions lymphatiques d’agneaux et de moutons adultes sains, même après un délai d’éviscération de 20 à 24 h post mortem (Gill, Penney, & Nottingham, 1976 ; Gill, Penney, & Nottingham, 1978).
7.2. L’éviscération retardée de 2 à 5h
Les travaux de Gill et Penney (1982) et Soriano et al. (2016) présentent des résultats avec des unités non comparables à celles de la réglementation européenne. Toutefois, ces deux études concluent que l’éviscération retardée de moins de 4 h n’aggrave pas le risque de contamination microbiologique de la viande. Avagnina et al. (2012) ont montré qu’au sein d'une même espèce (sanglier, chamois ou cerf), il n’y a pas d’augmentation de contamination des carcasses (bactéries aérobies ou anaérobies) jusqu’à 3 h après la mort. Cependant, dans leur étude incluant des animaux tués par tir de chasse, les niveaux de bactéries aérobies dépassent la limite supérieure imposée par l’Union Européenne concernant uniquement les abattoirs (5 log ufc /cm²) pour 18 % des sangliers, et les entérobactéries dépassent la limite supérieure réglementaire (2,5 log ufc/cm²) chez 39 % des ruminants. Selon les auteurs, le dépassement des normes sanitaires des carcasses est plus dépendant du processus d’abattage (tirs dans l’abdomen, manipulation) que d’un processus naturel post mortem (Avagnina et al., 2012). Cette conclusion est confirmée par d’autres auteurs qui observent que les bactéries se développent dans les muscles de cerfs et chevreuil quand l’abdomen est perforé par les impacts de tirs (Atanassova, Apelt, Reich, & Klein, 2008, Soares, McNeilly and Seguino, 2021). La Direction générale de l’alimentation (DGAL) mentionne dans son instruction DGAL/SDSSA/2021-634 que les carcasses de gibier en peau présentant des souillures d’origines digestives, ayant reçu des tirs dans l’abdomen, présentent un danger pour la santé publique.
Chez les animaux sauvages, le contenu digestif, incluant le microbiote intestinal, peut sensiblement varier en fonction des caractéristiques de l’animal, de la saison ou encore de la quantité d’aliment ingéré avant la mort. La quantité d’entérobactéries présentes dans le tube digestif de ces animaux peut être élevée, d’où l’intérêt d’apprécier correctement la présence de lésions du tube digestif liées aux tirs de chasse et d’être attentif à la qualité de l’éviscération (Soare, McNeilly, & Seguino, 2021 ; Ranucci, et al., 2021). Quand les tirs sont hors abdomen (tête, épaule, cœur, thorax) et que les sangliers sont rapidement amenés en salle réfrigérée, une éviscération retardée de 5 heures n’entraine pas d’augmentation significative de la contamination des carcasses (Ranucci et al., 2021). Un délai d’éviscération de 90 min sur des animaux tués à la chasse (sanglier, chevreuils et cerfs) n’a pas entrainé de détérioration sensible des qualités microbiologiques des viandes (Atanassova, Apelt, Reich, & Klein, 2008). En abattoir, il a été montré que les carcasses de bovins respectent les limites réglementaires européennes (dont 85 % sont en-dessous du seuil de détection des entérobactéries) après un report d’éviscération de 2 h (Marzin, 2011). D’après Ranucci et al. (2021), l’éviscération retardée est le quatrième facteur à prendre en compte par ordre d’importance pour limiter la prolifération des entérobactéries, après le temps de stockage précédant l’habillage, la température et la présence de pluie pendant la chasse. Les résultats de la littérature scientifique présentés dans le tableau 5 indiquent qu’un délai d’éviscération inférieur à 5 h (pour des températures moyennes entre 11 °C et 20 °C) n’a pas d’effet significatif sur la contamination microbiologique des viandes et respecte la règlementation européenne en vigueur dans les abattoirs.
7.3. Effets de l’éviscération retardée sur la translocation bactérienne
L’ANSES recommande par précaution un délai maximum de 60 minutes entre la saignée et l’éviscération, car les mécanismes de translocation bactérienne et les effets de l’éviscération retardée sont mal connus chez les animaux de boucherie (ANSES, 2010). Cependant, deux expérimentations réalisées en abattoir démontrent qu’une éviscération retardée de plus d’1 h30 de bovins et gnous respecte les limites réglementaires de contamination bactérienne (Marzin, 2011 ; Van Heerden, 2016). Une étude réalisée sur 66 porcs élevés en plein air en Allemagne et abattus en caisson d’abattage mobile par lots de 2 à 9 individus, indique qu’en conditions réelles d’abattage à la ferme, avec étourdissement et saignée dans le caisson, suivi d’un transport de 10 minutes jusqu’à l’abattoir (Wullinger-Reber, 2019), le délai entre la saignée et l’éviscération était compris entre 20 et 150 min. Dans cette étude, uniquement 2 carcasses sur les 66 et provenant du même lot d’abattage ont présenté des taux de contamination supérieurs aux limites réglementaires (Tableau 5).
Tableau 5 : Synthèse des résultats d’études de l’effet d’un délai jusqu’à 5 h entre mort et éviscération sur la qualité sanitaire des carcasses
* dépasse la limite inférieure fixée par le règlement CE 1441 2007
** est égal à la limite supérieure fixée par le règlement CE 1441 2007
L’Anses alerte sur les possibles biais relatifs aux méthodes d’évaluation de la translocation bactérienne. En effet, les difficultés techniques à détecter de faibles quantités de micro-organismes et l’attribution de contaminations à des artefacts expérimentaux, sous-estimerait la translocation bactérienne dans certains travaux antérieurs (ANSES, 2010). De plus, la grande majorité du microbiote digestif n’est pas révélée par la culture en laboratoire alors que les méthodes de séquençage nouvelle génération ou de PCR semblent plus adaptées. Or, l’ensemble des études présentées dans cette revue ne se basent que sur le dénombrement des micro-organismes après culture, conformément à la réglementation européenne. Les études omiques montrent de plus en plus les limites des techniques pasteuriennes car elles permettent de prendre en compte l’ensemble des micro-organismes présents dans le microbiote digestif tout en s’affranchissant des milieux de cultures spécifiques à chaque type de bactérie. D’autres études basées sur le séquençage permettraient d’avoir une meilleure connaissance des risques sanitaires liées à l’éviscération retardée des animaux de boucherie en étant vigilant aux limites de cette approche qui détecte également l’ADN de microorganismes morts.
La translocation bactérienne est favorisée par une décomposition rapide des tissus, or la cinétique de décomposition est plurifactorielle puisqu’elle dépend de la température ou encore de la présence d’insectes ou ravageurs nécrophages (Lee Goff, 2009). Or ces derniers sont maitrisés en abattoir et peuvent l’être, dans une moindre mesure, en caisson d’abattage.
7.4. Leviers d’action visant à réduire le risque sanitaire lors de l’éviscération retardée
Pour ralentir la prolifération et la translocation bactérienne, la température ambiante lors de l’étourdissement et de la saignée ne devrait pas excéder 15 °C (Stella et al., 2018) et les carcasses devraient être placées à 4 °C dès que possible (Clark, Worrell, & Pless, 1997 ; Ranucci et al., 2021). La température est supposée être plus variable en caisson d’abattage non réfrigéré, qu’en abattoir. La méthode des degrés cumulés consiste à évaluer la quantité de chaleur à laquelle ont été exposées les dépouilles, en attribuant des scores de gonflement identifiés en fonction des espèces considérées. Cependant, elle semble n’avoir été testée que dans des contextes où les délais dépassaient plusieurs jours. Néanmoins, dans les premières heures post mortem, une évolution quasi linéaire entre gonflement et cumul de chaleur depuis la mort est observée (Myburgh, 2010 ; Hyde, Haarmann, Lynne, Bucheli, & Petrosino, 2013). Le seuil à partir duquel il y a un risque sanitaire à pratiquer l’éviscération retardée pourrait, grâce à cette méthode, être déterminé en degrés par heure plutôt qu’en heures pour prendre en compte les effets conjugués du temps et de la température.
Certains auteurs recommandent d'ouvrir la cavité abdominale et de faire des incisions dans la zone axillaire pour améliorer le refroidissement dans le cas où la réfrigération n'est pas accessible (Paulsen, Bauer, Vodnansky, Winkelmayer, & Smulders, 2011). De plus, l’ouverture de la cavité abdominale permet de réduire la pression générale du corps lorsque le gonflement des organes commence. Enfin, le retrait du péritoine est efficace pour réduire le niveau de contamination chez les bovins (Marzin, 2011). Cependant, ces opérations qui nécessitent de faire des traits de coupe sur la dépouille de l’animal, pourraient entrainer un risque de contamination des parties incisées par les bactéries aéroportées, à la ferme et pendant le transport jusqu’à l’abattoir.
VIII. CONCLUSIONS
Cette revue a pour objectif de présenter les caractéristiques du tube digestif des animaux d’élevage et de son évolution post mortem dans le but d’appréhender le risque potentiel d’une éviscération retardée sur la contamination bactérienne des carcasses d’animaux de boucherie. Ces recherches s’inscrivent dans un contexte d’évolution de la réglementation et des méthodes alternatives d’abattage des animaux de ferme, pour pallier un déficit d’abattoirs conventionnels, pour limiter la durée de transport et pour mieux convenir aux modes de commercialisation des produits carnés en circuits courts. Si la composition, la physiologie du tube digestif et le microbiote qu’il héberge sont bien documentés, la littérature scientifique est relativement pauvre sur le devenir post mortem des bactéries commensales et plus particulièrement sur leurs éventuels transferts vers les muscles. De plus, la majorité des articles disponibles portent sur le gibier qui présente un risque non négligeable de perforation des viscères par les tirs de chasse et dont l’environnement post mortem est mal maitrisé, contrairement aux animaux de ferme. Néanmoins, l’analyse de la littérature scientifique disponible indique qu’une éviscération réalisée 5 heures après la mort de l’animal ne présente pas de risque sanitaire si la température ambiante ne dépasse pas 20 °C. Dans ces conditions, les analyses bactériologiques révèlent que les quantités d’entérobactéries et de bactéries aérobies sont inférieures aux limites du règlement européen CE 1441/2007. Cependant, des études complémentaires avec notamment des approches omiques sont nécessaires pour acquérir des connaissances ciblées sur les cinétiques de transfert et migration post mortem du microbiote digestif à l’issue d’abattages réalisés en conditions contrôlées, incluant des enregistrements de température ambiante et corporelle.
Remerciements
Les auteurs remercient l’association Pour des Abattages Paysans et son président, Jacques Alvernhe, pour avoir initié cette revue bibliographique. Dans sa volonté de mettre en valeur et permettre l’émergence d’initiatives d’abattage paysan de proximité, elle a compris l’opportunité d’un tel travail, mobilisé les moyens nécessaires et fédéré les énergies. Les auteurs remercient également l’ADEAR pour le financement du contrat de L. Duverne.
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