Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

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Point de vue : les critiques à l’égard de la viande bovine sont-elles fondées ?

La consommation de viandes rouges (bœuf, mouton, porc) fait l’objet de critiques récurrentes. Cependant, si elle augmente les risques de cancers chez les très gros mangeurs, les bénéfices nutritionnels de son incorporation dans la diète hebdomadaire sont nombreux : apports de protéines de très bonne qualité, de fer assimilable et de vitamine B12. La consommation d’eau prélevée dans les ressources aquatiques (600 litres par kilo de bifteck) est loin d’atteindre les 15 000 litres souvent avancés, valeur qui intègre l’eau de pluie. Il est inexact d’affirmer que l’élevage des bovins conduit à un gaspillage « inacceptable » de protéines végétales : en France, il produit parfois plus de protéines consommables par les hommes qu’il n’en consomme. En participant à la conservation des prairies qu’ils transforment en viande et en lait, les bovins et les ovins contribuent à la biodiversité, à la fixation du carbone dans les sols, à la recharge des nappes phréatiques avec une eau de bonne qualité et à l’aménagement du territoire. Il est néanmoins une critique qu’il faut faire à l’élevage : il contribue fortement à l’émission de gaz à effet de serre. Les généticiens, les spécialistes de l’alimentation animale et plus globalement les éleveurs doivent unir leurs efforts pour réduire cet impact. Enfin, le bien-être des animaux doit être garanti. Sinon, les consommateurs pourraient se tourner vers des aliments à plus faible impact climatique : légumes secs, hachis et galettes végétales, voire des viandes de culture.

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Edito

A point nommé

La publication dans cette lettre d’information de "l’appel à action de Denver" et d’un article expliquant la genèse de cette mobilisation de chercheurs du monde entier (1) en faveur d’un débat public rationnel et étayé scientifiquement sur l’élevage et la viande tombe à point nommé. Une émission télévisée toute récente (2) illustre à quel point le traitement de ces questions semble vouloir régulièrement sortir de ce cadre pour y être porté sur un terrain émotionnel et moral, mais surtout idéologique. A son corps défendant, l’élevage et la viande se retrouvent ainsi attirés, comme dans un guet-apens, dans un affrontement fantasmé entre animal et végétal. L’essentiel du documentaire a ainsi été consacré à discréditer une partie des acteurs du débat, affublés des arrière-pensées les plus sombres. Au bout d’une heure trente, qu’est-ce que le téléspectateur aura retenu? Pratiquement rien, en dehors de ces supposés noirs desseins des filières, puisque l’émission réussit la performance de n’aborder aucun des sujets sur le fond. Le citoyen n’aura ainsi rien appris sur la consommation de viande en particulier de viande rouge (inférieure en moyenne en France aux recommandations nutritionnelles). Il ne saura rien des méthodes d’élevage en cours en France en comparaison de celles du reste du monde (il y aurait pourtant tant à dire). Il ne connaitra pas plus non plus les contributions et efforts du secteur élevage-viande en matière d’atténuation climatique. Alors oui, les signataires de l’appel de Denver ont raison de se mobiliser pour une politique guidée par le souci d'une alimentation équilibrée et de vouloir en finir "avec le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs pour en revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées". Ces chercheurs ont aussi raison d’attirer l’attention sur la prise en compte de la reconnaissance de la complexité des systèmes d'élevage et de l'écologie ou de rappeler que le rôle des scientifiques est de se confronter les uns aux autres "en appliquant des méthodes scientifiques rigoureuses, dans le respect mutuel et avec ouverture d’esprit". Non, la viande n’est ni de gauche ni de droite, ni masculine ni féminine, ni malfaisante ni miraculeuse. Elle participe à l’équilibre alimentaire de milliards d’hommes et mérite mieux que d’être ainsi l’otage de combats politiques complaisamment mis en scène.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE

(1) https://www.dublin-declaration.org/fr/
(2) https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/7205066-la-guerre-de-l-info-touche-pas-a-mon-steak.html