Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

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Quel affichage environnemental pour les viandes de ruminants ?

INTERBEV, l’Association Nationale Interprofessionnelle du Bétail et des Viandes a participé à l’expérimentation d’un affichage environnemental des produits alimentaires, promulgué initialement par la loi AGEC (loi anti-gaspillage pour une économie circulaire) puis par la loi « Climat et Résilience ». L’objectif principal pour INTERBEV était de contribuer à l’évolution des méthodologies environnementales basées sur l’ACV (Analyse de Cycle de Vie) et des données de la base d’inventaires du cycle de vie (ICV) Agribalyse®. Les méthodes ACV telles que développées aujourd’hui et les ICV disponibles pour l’agriculture présentent actuellement des lacunes et s'avèrent par construction défavorables aux viandes de ruminants, dont la production est inscrite dans un cycle de vie long. A l’inverse, les bénéfices environnementaux reconnus par la société et les politiques publiques, liés notamment à la valorisation des prairies et aux services associés (par exemple biodiversité, stockage de carbone), ne sont pas intégrés. Ce projet a permis de rebalayer les indicateurs existants – en ACV ou hors-ACV – visant en partie à combler ces manques et de requestionner certains aspects de la méthodologie utilisée dans les ICV Agribalyse (allocation, indicateur « changement climatique », usage des sols). Différentes modalités de pondération et d’agrégation ont ensuite été testées, en intégrant les attentes des consommateurs et les enjeux prioritaires identifiés à la fois par les parties prenantes (ONG notamment) et par les acteurs de la filière. Les travaux montrent qu’une évaluation et un affichage alternatifs à ceux basés sur la seule ACV est non seulement possible mais indispensable pour une vision complète des systèmes agricoles et un choix éclairé des consommateurs.

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Edito

A point nommé

La publication dans cette lettre d’information de "l’appel à action de Denver" et d’un article expliquant la genèse de cette mobilisation de chercheurs du monde entier (1) en faveur d’un débat public rationnel et étayé scientifiquement sur l’élevage et la viande tombe à point nommé. Une émission télévisée toute récente (2) illustre à quel point le traitement de ces questions semble vouloir régulièrement sortir de ce cadre pour y être porté sur un terrain émotionnel et moral, mais surtout idéologique. A son corps défendant, l’élevage et la viande se retrouvent ainsi attirés, comme dans un guet-apens, dans un affrontement fantasmé entre animal et végétal. L’essentiel du documentaire a ainsi été consacré à discréditer une partie des acteurs du débat, affublés des arrière-pensées les plus sombres. Au bout d’une heure trente, qu’est-ce que le téléspectateur aura retenu? Pratiquement rien, en dehors de ces supposés noirs desseins des filières, puisque l’émission réussit la performance de n’aborder aucun des sujets sur le fond. Le citoyen n’aura ainsi rien appris sur la consommation de viande en particulier de viande rouge (inférieure en moyenne en France aux recommandations nutritionnelles). Il ne saura rien des méthodes d’élevage en cours en France en comparaison de celles du reste du monde (il y aurait pourtant tant à dire). Il ne connaitra pas plus non plus les contributions et efforts du secteur élevage-viande en matière d’atténuation climatique. Alors oui, les signataires de l’appel de Denver ont raison de se mobiliser pour une politique guidée par le souci d'une alimentation équilibrée et de vouloir en finir "avec le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs pour en revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées". Ces chercheurs ont aussi raison d’attirer l’attention sur la prise en compte de la reconnaissance de la complexité des systèmes d'élevage et de l'écologie ou de rappeler que le rôle des scientifiques est de se confronter les uns aux autres "en appliquant des méthodes scientifiques rigoureuses, dans le respect mutuel et avec ouverture d’esprit". Non, la viande n’est ni de gauche ni de droite, ni masculine ni féminine, ni malfaisante ni miraculeuse. Elle participe à l’équilibre alimentaire de milliards d’hommes et mérite mieux que d’être ainsi l’otage de combats politiques complaisamment mis en scène.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE

(1) https://www.dublin-declaration.org/fr/
(2) https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/7205066-la-guerre-de-l-info-touche-pas-a-mon-steak.html