Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

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La race a-t-elle un effet sur la qualité sensorielle de la viande de jeune bovin ?

Dans le cadre du consortium européen Gemqual, 436 jeunes bovins issus de 15 races bovines différentes ont été conduits dans des systèmes d'élevage similaires afin d'évaluer l'impact de la race sur la qualité organoleptique de la viande déterminée par analyse sensorielle. Une comparaison de deux méthodes statistiques pour traiter les données de l'analyse sensorielle a tout d'abord été réalisée. L'analyse de variance avec ou sans effet dégustateur a abouti à des résultats similaires indiquant que ce choix méthodologique n'est pas décisif pour l'interprétation des résultats. Une classification non supervisée (classification ascendante hiérarchique) a ensuite permis de classer les races en fonction de trois profils sensoriels sur la base de 4 descripteurs (tendreté, jutosité, intensité de flaveur et flaveur anormale). Elle permet de mettre en évidence 5 associations de races. : Les races Aberdeen Angus, Highland et Jersey, qui ont une teneur élevée en lipides dans le muscle étudié (Longissimus thoracis), se sont distinguées des autres races par une flaveur de bœuf plus élevée. Les races mixtes et rustiques, Simmental, Casina et Marchigiana, ont produit une viande significativement moins juteuse et moins tendre que celle des races sélectionnées pour la production de viande. Les trois autres associations suivantes rassemblent les races Limousine et Charolaise dont le profil semble assez proche, les races Pirenaica et Avilena tendres et fortement appréciées par les panélistes, les races Asturiana de los Valles et Piemontaise caractérisées par une flaveur anormale plus intense.
Dans l'ensemble, malgré des différences significatives de caractéristiques de l'animal, de la carcasse et du muscle, les différences de qualité sensorielle entre la plupart des races étaient faibles, avec seulement des différences significatives entre les quelques races qui présentaient des profils sensoriels extrêmes (comme la Simmental et la Pirenaica).

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Edito

A point nommé

La publication dans cette lettre d’information de "l’appel à action de Denver" et d’un article expliquant la genèse de cette mobilisation de chercheurs du monde entier (1) en faveur d’un débat public rationnel et étayé scientifiquement sur l’élevage et la viande tombe à point nommé. Une émission télévisée toute récente (2) illustre à quel point le traitement de ces questions semble vouloir régulièrement sortir de ce cadre pour y être porté sur un terrain émotionnel et moral, mais surtout idéologique. A son corps défendant, l’élevage et la viande se retrouvent ainsi attirés, comme dans un guet-apens, dans un affrontement fantasmé entre animal et végétal. L’essentiel du documentaire a ainsi été consacré à discréditer une partie des acteurs du débat, affublés des arrière-pensées les plus sombres. Au bout d’une heure trente, qu’est-ce que le téléspectateur aura retenu? Pratiquement rien, en dehors de ces supposés noirs desseins des filières, puisque l’émission réussit la performance de n’aborder aucun des sujets sur le fond. Le citoyen n’aura ainsi rien appris sur la consommation de viande en particulier de viande rouge (inférieure en moyenne en France aux recommandations nutritionnelles). Il ne saura rien des méthodes d’élevage en cours en France en comparaison de celles du reste du monde (il y aurait pourtant tant à dire). Il ne connaitra pas plus non plus les contributions et efforts du secteur élevage-viande en matière d’atténuation climatique. Alors oui, les signataires de l’appel de Denver ont raison de se mobiliser pour une politique guidée par le souci d'une alimentation équilibrée et de vouloir en finir "avec le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs pour en revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées". Ces chercheurs ont aussi raison d’attirer l’attention sur la prise en compte de la reconnaissance de la complexité des systèmes d'élevage et de l'écologie ou de rappeler que le rôle des scientifiques est de se confronter les uns aux autres "en appliquant des méthodes scientifiques rigoureuses, dans le respect mutuel et avec ouverture d’esprit". Non, la viande n’est ni de gauche ni de droite, ni masculine ni féminine, ni malfaisante ni miraculeuse. Elle participe à l’équilibre alimentaire de milliards d’hommes et mérite mieux que d’être ainsi l’otage de combats politiques complaisamment mis en scène.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE

(1) https://www.dublin-declaration.org/fr/
(2) https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/7205066-la-guerre-de-l-info-touche-pas-a-mon-steak.html