Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

 A la une ...


 
 

 

DERNIERS ARTICLES PARUS

Résumés - Process et Technologies

L’impact de la position du pistolet à tige perforante sur les dommages cérébraux a été étudié sur 19 bovins. L’objectif était de définir une méthode fiable pour léser le Système Réticulé Activateur Ascendant (SRAA) qui est fortement impliqué dans la conscience. Les positions testées ont été deux positions situées à l’intersection des diagonales entre l’œil de l’animal et la base de la corne opposée (positions Basse, Œil-corneB et Haute ; Œil-corneH) et deux positions situées au milieu d’une ligne entre le sommet de la tête et la ligne reliant les deux yeux de l’animal (positions Basse, MédianeB, et Haute, MédianeH). En utilisant la position Œil-corneB, la tige est passée le plus souvent sous le cerveau. Les positions Œil-corneB et Œil-corneH ont été influencées par la forme de la tête. Les positions MédianeB et Œil-corneH ont permis de léser le SRAA d’environ la moitié et les trois-quarts des animaux, respectivement. La position MédianeH a permis quant à elle de léser le SRAA de manière satisfaisante (dans la zone cible : 95% des animaux ; à la limite de la zone cible : 5% des animaux). Les inconvénients de cette position sont le risque d’un tir trop caudal et le fait que les canthi externes des yeux sont plus difficilement repérables. En conclusion, placer le pistolet 1 cm plus bas que la position MédianeH, ou environ 2 à 3 cm plus haut que les positions Œil-corneH ou MédianeB, maximise la probabilité de léser le SRAA, en limitant les risques d’un tir trop caudal.

La dénomination de "veau rosé" est diversement définie et peu étudiée en France. Cette production est bien adaptée aux races locales, comme dans le cas de la Maraîchine. Les performances d’abattage des veaux rosés extraites d’une base de données de 119 veaux obtenue entre 2009 à 2023 sur l’unité expérimentale INRAE de Saint-Laurent-de-la-Prée sont décrites. Les caractéristiques biochimiques et métaboliques ainsi que les qualités sensorielles et nutritionnelles des viandes ont été analysées sur échantillon de 30 veaux rosés (15 élevés au pis et à l’herbe (pâture et/ou foin) (régime H) et 15 veaux élevés au pis et complémentés aux concentrés (régime C)) issus de 8 élevages différents. Les veaux ont un poids vif moyen de 219 kg, un poids carcasse de 128 kg et un poids de viande de 90 kg. Les rendements carcasse sont en moyenne de 59 % et les rendements viande de 70 %. La viande de veau rosée est pauvre en lipides (1,3g/100g de tissu). Elle présente une proportion d’AGPI élevée proche de 20% et un rapport AGPI n-6/n-3 proche de 2. Le régime alimentaire des veaux a des impacts significatifs sur la qualité de la viande. Le régime H impacte la conformation des carcasses, la couleur de la viande, la teneur en fer (+ 24%) et la tendreté. Il augmente de 53% la proportion de fibres lentes et oxydo-glycolytiques. Certaines teneurs en acides gras d’intérêt, en vitamine B2 et des indicateurs santé sont également augmentées. Enfin le régime H entraine également un double enrichissement en antioxydants endogènes ou exogènes et une diminution des teneurs en vitamines B3 et B6.

La demande croissante de viande de haute qualité a conduit au développement d'un système de classement visant à évaluer et à améliorer la qualité de la viande bovine. En Europe, le système de classement obligatoire est la grille EUROP, qui est focalisée sur la conformité et l’engraissement des carcasses. En revanche, le système de classement basé sur la méthodologie australienne (Meat Standards Australia - MSA), permet de prédire la qualité sensorielle préalablement évaluée par des consommateurs non experts. D’une façon générale, pour faciliter la communication entre acteurs, les ontologies sont utilisées pour décrire les domaines de connaissance. Certaines terminologies techniques sont ambiguës et varient selon les pays, notamment pour les produits carnés, ce qui nécessite une collecte minutieuse d'informations pour créer une base de données précise. L'objectif de cette étude a été d'identifier, de décrire et de comparer les définitions issues d'ontologies et de bases de données existantes dans le domaine de la viande bovine dans le cadre du projet de recherche européen INTAQT (https://h2020-intaqt.eu/). Cinquante-six termes ont été identifiés et regroupés en huit catégories. Leurs définitions extraites d’une vingtaine d’outils terminologiques ont été comparées. Les avantages de ces comparaisons incluent une meilleure compréhension du domaine, des possibilités de choix de variables plus précises et des améliorations dans la recherche et la communication. Cependant, il y a encore des défis dans la recherche de termes spécifiques, et il est essentiel de normaliser le langage commercial pour faciliter la collaboration entre les professionnels de l'industrie de la viande. En résumé, il est nécessaire de créer une source unique avec des définitions solides pour les termes du système de classement MSA, ainsi qu'une ontologie mondiale pour la qualité de la viande bovine afin de standardiser les analyses.

Face à des attentes de plus en fortes de la société sur les questions de bien-être et de santé animale, et dans un contexte de révision de la réglementation européenne sur le bien-être des animaux d’élevage, plusieurs travaux ont été menés par l’Institut de l’Élevage en collaboration avec divers partenaires dont INRAE. Ces travaux, financés par l’interprofession INTERBEV Veaux ou par le Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, ont notamment porté sur le recensement des principales attentes de la société concernant la conduite des veaux de boucherie qui ont mis en lumière les volontés de mettre à disposition des animaux : un accès extérieur, une litière pour le couchage, de la lumière naturelle, du fourrage et un logement collectif dès le plus jeune âge. Concernant le logement des animaux, un état des lieux des principales caractéristiques des bâtiments d’élevage utilisés en France pour la production de veaux a été réalisée. De plus, des essais ont également été menés pour acquérir des références sur l’impact de différents paramètres du logement sur le bien-être et la santé des veaux (type de sol, taille des groupes, logement collectif dès le démarrage). Enfin, des études ont été menées sur l’alimentation et la santé des veaux en cours d’élevage pour évaluer d’une part l’impact d’apports différenciés d’aliments solides sur le métabolisme et le comportement des veaux et d’autre part l’utilisation des antibiotiques dans la filière entre 2013 et 2020 suivi de la mise en place d’outils d’évaluations de la biosécurité en élevage.

La contamination de l’air ambiant de 8 halls d’abattage à dominante gros bovins de cadence comprise entre 24 et 70 gros bovins/h, a été caractérisée en fonction des installations de traitement d’air en place. Sur la base des données acquises, des seuils de dénombrements en cohérence avec les données de la bibliographie, ont été proposés pour le contrôle de la flore totale aéroportée. Pour tous les halls d’abattage, les niveaux de contamination de l’air en flore totale et en entérobactéries décroissent depuis l’amenée jusqu’au ressuage. Les niveaux de contamination en « zone sale » (depuis l’amenée des animaux jusqu’à l’arrache cuir) sont peu différents entre halls d’abattage et excédent 3,2 log UFC/m3. Celle des « zones propres » (depuis l’émoussage jusqu’au ressuage) est en revanche beaucoup plus variable et illustre l’impact de la configuration des halls d’abattage. Ainsi, les centrales de traitement d’air (CTA) apportent une plus-value pour maîtriser les flux d’air des zones arrache-cuir, émoussage et pesée, par rapport aux extractions seules mais le recours à cet équipement n’est pas suffisant pour maitriser la contamination de l’air de ces zones. En effet, le cloisonnement des zones propres et sales, la position des bouches d’extraction en zone propre, prévues pour aspirer la vapeur des carcasses et des équipements (steam vacuum par exemple), sont est la maîtrise des fuites d’air depuis la triperie poil vers la zone propre sont également à prendre en compte. L’apport de filtres de type F9 dans les CTA pour traiter microbiologiquement l’air extérieur insufflé en zone propre limite la variabilité des niveaux de contamination en flore totale même si, l’aérocontamiantion des zones d’émoussage et de pesée reste, comme les autres configurations, supérieur à celui de l’air extérieur (2,4 log UFC/m3).

La filière « viande » réfléchit à assurer la garantie de délivrer à ses clients des produits réguliers en qualité. Toutefois, les méthodes utilisées pour qualifier la tendreté de la viande sont pour la majorité destructives puisqu’elles nécessitent le prélèvement d’échantillons de la viande à qualifier. De ce fait, la tendreté n’est pas ou peu évaluée dans la filière. L'objectif de cette étude est de proposer un test non destructif, idéalement réalisable sur carcasse et/ou en ligne permettant de se substituer aux tests invasifs classiquement utilisés au laboratoire (test de cisaillement de Warner-Bratzler, test de dureté, test de pénétration, test de cuisson). L’essai envisagé est un test d’indentation/relaxation/recouvrance qui conduit à l’estimation d’indicateurs de tendreté. Le protocole d’indentation consiste en la pénétration d’une pointe hémisphérique, en son maintien en position et en son rapide retrait, phase liée au retour à l’équilibre, pendant laquelle le mouvement de la surface de la viande est particulièrement suivi. Un travail préliminaire sur deux pièces de viande dont les niveaux de tendreté sont très différents a permis de mettre en relation certains de ces indicateurs avec les données issues d’un test par compression (tendéromètre), dispositif mis à disposition pour cette étude par l’Association pour le Développement de l’Institut de la Viande de Clermont-Ferrand (ADIV). En particulier, après indentation, le rond de gite retourne plus rapidement à son état d’équilibre que le faux filet. La tendance observée sur cette phase dite de « recouvrance » semble corrélée avec des données plus classiques obtenues lors d’essais de pénétromètrie sur des échantillons similaires. Des études statistiques doivent maintenant être réalisées pour valider l’utilisation de cet outil pour la qualification industrielle des pièces de viande.

Load More

Abonnez-vous !

Recevez notre Newsletter chaque trimestre. Vous êtes actuellement 5528 abonnés. VERIFIEZ DANS LES SPAMS ET ENREGISTRER L'EXPEDITEUR DANS VOTRE CARNET D'ADRESSES

Edito

Science, ingérences et persillé

Les débats sur l’avenir de l’élevage et la viande ont bien du mal aujourd’hui à se départir d’un faisceau d’apriori idéologiques, de visées politiques mais aussi d’arrière-pensées commerciales. Un rapport de l’Ecole de guerre économique présenté début décembre dans les salons du Sénat à l’initiative du sénateur du Morbihan Yves Bleunven a ainsi mis au jour les troublantes connections entre les associations animalistes et environnementalistes œuvrant en Europe, les associations « philanthropiques » américaines qui les subventionnent et les investisseurs de la « foodtech » d’Outre-Atlantique qui ont misé d’énormes sommes sur les profits éventuels à tirer des alternatives végétales et de la « viande » artificielle. Entre 2017 et 2022, l’une de ces associations -qui s’est fait connaitre par la diffusion de vidéos-chocs tournées dans des élevages et des abattoirs- a reçu pas moins de 6,1 millions de dollars, dont une part importante provenant de l'Open Philanthropy Project (OPP). En seulement six ans, écrivent les auteurs, les dons à cette association groupusculaire ont triplé, « atteignant plus de 3M$ en 2023 ». Depuis 2016, la fondation a alloué plus de 40 M€ à diverses organisations animalistes, principalement en Europe, « afin d’influencer les débats politiques et réglementaires (notamment lors des débats sur la bientraitance animale ou de la directive IED) », affirment les auteurs. Le rapport pointe également les liens flagrants entre organisations philanthropiques et investisseurs des alternatives à la viande. Les auteurs montrent notamment comment les fondateurs des associations Mercy for Animals et PETA ont fondé le Good food institute, chargé de soutenir la « foodtech ». Entre 2014 et 2023, ce fonds « a financé la recherche et le lobbying du secteur à hauteur de 21 millions de dollars ». Une ingérence aujourd’hui encore insuffisamment prise au sérieux par l’agriculture et l’agroalimentaire européens « pour lesquels il s’agit pourtant d’une question de souveraineté », estime le sénateur Yves Bleunven.
Contre toutes les simplifications, les raccourcis ou les parti-pris plus ou moins honnêtes ciblant l’élevage et la viande, plusieurs dizaines de chercheurs ont lancé un nouvel appel « de Denver » en faveur « d’une politique guidée par le souci d’une alimentation adaptée ». « Le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs doit cesser afin que nous puissions revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées, qui nourrissent et respectent à la fois les consommateurs et les producteurs de ces aliments, au lieu de les discréditer sans cesse », écrivent-ils, dans le prolongement de la déclaration de Dublin, prononcée en 2022 sur le rôle sociétal de l'élevage signée par plus de 1 200 scientifiques du monde entier.
https://www.dublin-declaration.org/fr/lappel-a-action-de-denver
Bien loin de ces débats idéologiques et surtout mercantiles, ce numéro de VPC s’attache à une caractéristique essentielle de la viande bovine dans le plaisir que sa consommation procure : le persillé. En six articles, nous espérons répondre à tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur ce sujet peut-être moins clivant que celui de la viande artificielle mais pas si anodin pour l’orientation de la filière bovine française. Ainsi, les chercheurs continuent de travailler sans relâche car il convient de ne pas détourner l’attention du grand public de l’essentiel, à savoir la nécessité de s’appuyer sur la science pour correctement évaluer et améliorer les systèmes d’élevage et la qualité de leurs produits dont celle de la viande.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE