La revue Viandes et produits carnés

La revue française de la recherche en viandes et produits carnés  ISSN  2555-8560

flickrfacebooktwitterdiggstumbleuponfeed

 lES DERNIERS ARTICLES PARUS

 
 

Saucissons secs fermiers du Massif central

Résumé de l'article | 

Introduction au programme européen TRADISAUSAGE

Le principal objectif du projet européen TRADISAUSAGE (QLK1 - CT2002-02240 ; http://www.clermont.inra.fr/tradisausage) qui a impliqué 10 partenaires (coordination : Unité Microbiologie de l’INRA, Centre de Clermont-Ferrand Theix) de 6 Etats européens (France, Portugal, Espagne, Italie, Grèce et Slovaquie) était d’étudier les voies pour assurer la sécurité des saucissons secs fermiers, tout en préservant leur typicité.

saucisson image redD’après une synthèse réalisée à partir des différentes propositions de décret (APCA, 1998: FNAPF, 2001) et de projets de recherche européens (François, 1996), il est possible de dégager une définition globale des produits fermiers (Rason et al., 2003) qui a servi de base pour ce travail : "un produit alimentaire est considéré comme fermier s’il est fabriqué par un producteur ayant le statut d’agriculteur (ou sous sa responsabilité), si la matière première utilisée provient de l’exploitation, si la fabrication est réalisée selon des pratiques traditionnelles et si le producteur est responsable de son produit jusqu’à l’achat par le consommateur afin de lui garantir son origine". Pour cette étude nous avons considéré uniquement les saucissons secs pur porc fabriqués sans ajout de ferments et de conservateur.

Historiquement la production fermière a été liée à une économie agricole autarcique et à la vente d’un surplus. Cette activité a diminué avec l’urbanisation et la modernisation de l’agriculture : à la fin des années 1970, la production fermière était marginale et perçue comme la "non modernité". Depuis les années 1980, on observe un renouveau de la production fermière en France, mais également dans d’autres pays de l’Union européenne. D’après le recensement agricole en 2000, en France, le nombre d’exploitations pratiquant la vente directe de produits agricoles de la ferme, transformé ou non, est estimé à 101 988, dont 6l 394 ont une activité de transformation. Selon les organisations agricoles, face aux évolutions de la PAC, le développement de la production fermière, et plus généralement de la diversification, constitue un enjeu important pour le maintien d’une agriculture dans les zones de montagne. Il s’agit d’une véritable stratégie alternative, diversification des produits et des métiers, menée par des agriculteurs qui cherchent à intégrer l’aval pour récupérer la valeur ajoutée liée à la transformation et à la commercialisation (Lagrange, 1995).saucisson fig1 red

Il a été montré par plusieurs auteurs que la transformation à la ferme apporte une valeur ajoutée qui permet la pérennité des exploitations et favorise leur développement dans les zones rurales. C’est un atout non négligeable dans le maintien des emplois et du tissu social dans les régions de montagne. Par ailleurs, dans un contexte de perte de confiance dans les produits "industrialisés", le consommateur a tendance à se tourner vers les produits alimentaires dits "moins industriels" et "sincères" et à circuit de commercialisation court.

Avec plus de 100 000 exploitations agricoles qui pratiquent la vente directe de leurs produits agricoles transformés ou non (Agrest, 2001), les produits fermiers font partie de l’univers alimentaire des consommateurs. D’après une enquête réalisée par Melet et Sylvander (1994), 58,5 % des consommateurs interrogés déclaraient avoir acheté au moins une fois un produit fermier dans leur vie. Ce marché, aujourd’hui en pleine expansion, constitue actuellement 5 à 10 % de la demande alimentaire (Moinet, 2002). Ce développement peut être dû à la combinaison de plusieurs facteurs. En effet, la vente en circuit court des produits fermiers permet au producteur de mieux valoriser sa production et aux consommateurs de se procurer des produits en adéquation avec ses préoccupations actuelles (authenticité, lien avec le monde rural,...).

Pendant longtemps, la charcuterie fermière servait à l’autoconsommation ou était vendue à des clients proches de la ferme. Ces vingt dernières années, le développement de la transformation et de la vente directe a fait évoluer cette production. Elle s’est diversifiée afin de fournir des produits à une clientèle plus large (urbaine, touristique). Cependant, aucune donnée n’est actuellement disponible sur les volumes et les modes de production des saucissons secs fermiers : il n’existe pas actuellement de système d’information organisé sur ce domaine (CNA, 2003).saucisson fig2 red

Toutefois, le recensement général de l’agriculture de 2000 (Agrest, 2001), réalisé sur dix départements du Massif central, indique que sur les 11 000 exploitations pratiquant l’élevage porcin, 850 transforment sur l’exploitation pour la vente directe de produits fermiers. L’atelier de transformation charcutière fermière qu’il soit sur l’exploitation ou collectif correspond à une ou plusieurs pièces aménagées ayant le matériel nécessaire au bon déroulement de la transformation, de la conservation et de la commercialisation des produits. Il doit répondre au moins aux réglementations sanitaires nationales contrôlées par les services vétérinaires. La production charcutière fermière se distingue des produits industriels ou artisanaux aux yeux des consommateurs par sa diversité organoleptique (François, 2000). Différents facteurs construisent cette diversité sensorielle : le choix du mode de production, celui de la matière première et de la pratique de transformation.

La sécurité et la qualité alimentaire font parties des préoccupations majeures des consommateurs et sont incluses dans les priorités de la politique européenne au travers notamment du Livre blanc sur la sécurité alimentaire (2000). Dans ce contexte européen, les petits producteurs ont des difficultés techniques et financières à se conformer aux réglementations officielles de sécurité alimentaire notamment pour les normes d’hygiène, généralement définies pour les grandes installations de transformation, et qui ne sont pas toujours compatibles avec la très petite taille de ces unités de production.

Or il est crucial de donner aux producteurs fermiers les moyens de produire des produits sûrs, afin d’assurer leur survie et leur développement. Le capital confiance que le consommateur place dans les produits fermiers ne pourra se maintenir sur le long terme que si ces produits présentent les avantages et les garanties auxquels le consommateur est aujourd’hui habitué, c’est-à-dire la régularité dans la qualité et le respect des normes sanitaires. Le développement de la part de marché des produits fermiers passera probablement par :
- une maîtrise sans faille de la qualité et de la traçabilité ; tout en préservant la typicité des produits mis en marché,
- l’innovation au niveau des produits pour répondre aux attentes des consommateurs ; tout en maintenant l’ancrage dans la tradition,
- le développement de nouvelles pratiques de commercialisation.

saucisson fig3 redUne bibliographie a mis en évidence le faible nombre d’études récentes sur les caractéristiques socio-économiques des ateliers fermiers, la diversité des savoir-faire de fabrication ou la commercialisation des produits fermiers. Encore moins d’études ont abordé la sécurité des saucissons secs fermiers des producteurs aux consommateurs.

C’est pour traiter ces questions que le projet européen TRADISAUSAGE a été construit et labellisé en 2002 par la Commission européenne. Ce projet comprend 10 partenaires (coordination : Régine TALON, Unité de Microbiologie de l’INRA, Centre de Clermont-Ferrand Theix) de six Etats européens (France, Portugal, Espagne, Italie, Grèce et Slovaquie). Il a pour objectif principal d’évaluer et d’améliorer la sécurité des saucissons secs traditionnels (fermiers pour le Massif Central) des producteurs aux consommateurs, tout en préservant leur diversité et leur typicité.

L’acronyme TRADISAUSAGE correspond à "Assessment and improvment of safety of traditional dry sausages from producers to consumers" ; qui en français se traduit par "Évaluation et amélioration de la sécurité microbiologique des saucissons secs traditionnels des producteurs aux consommateurs".

Pourquoi parle-t-on d’atelier traditionnel ? Parce qu’à l’échelle de l’Europe du Sud, les ateliers de transformations sont principalement tenus par des charcutiers ; la France faisant figure d’exception avec une prépondérance des ateliers fermiers.

Dans une première étape, nous nous sommes attachés à recenser les ateliers fermiers (plus d’une centaine) du Massif central produisant des saucissons secs pur porc. Les producteurs fermiers ont ensuite été enquêtés. L’objectif de ce travail était de mieux cerner les facteurs techniques responsables de la diversité des saucissons secs fermiers en identifiant les modes de production et les pratiques de fabrication. Certains facteurs socio-économiques et commerciaux ont également été investigués.

Comme aucune donnée sur les consommateurs n’était disponible, une enquête a porté sur leurs habitudes de conservation et de consommation. Les informations recueillies pourront être utiles aux producteurs pour répondre aux questions des acheteurs sur la qualité, la sécurité et les modes de production de ces produits fermentés. De plus les données recueillies sur les habitudes de conservation des consommateurs ont permis de réaliser des tests en laboratoire sur la stabilité microbiologique des saucissons secs fermiers dans les conditions réelles de conservation.

Il existe un grand nombre de recettes pour la fabrication des saucissons secs fermiers; la base est toujours le maigre et le lard de porc, mélangés à du sel et des épices. La fermentation est assurée par les flores microbiennes présentes sur la matière première et dans l’atelier. Ces flores microbiennes comprennent les micro-organismes intervenant dans la fermentation et le développement de la flaveur (flore d’intérêt technologique) ; ainsi que la flore d’altération et parfois des espèces pathogènes.

Au début de ce projet, aucune donnée n’était disponible sur les contaminations microbiennes tout au long du processus de fabrication et lors de la conservation chez le consommateur. La caractérisation de ces microflores est toutefois cruciale car d’elles dépendent la sécurité (flore pathogène), l’acceptabilité (flore d’altération) et la qualité gustative (flore technologique) des produits mis en marché et consommés.

Une partie importante des travaux menés dans le cadre du projet TRADISAUSAGE a porté sur :
- l’identification des points critiques tout au long du procédé de fabrication,
- le recueil de données sur les flores pathogènes et d’altération dans les ateliers et les produits au niveau de ces points critiques,
- l’évaluation de la qualité et de la sécurité de ces produits en regard des amines biogènes,
- le dénombrement, l’identification et la caractérisation de la flore microbienne d’intérêt technologique ; avec pour objectifs de mieux connaître la biodiversité et de développer des ferments isolés des ateliers pouvant s’implanter dans les produits ou coloniser les ateliers,
- les procédures de désinfection ciblées, éliminant les flores d’altération et pathogène tout en préservant la flore d’intérêt technologique en vue de développer une approche d’écologie microbienne dirigée.

Les résultats du projet concernant la France sont présentés dans les différents chapitres publiés dans ce numéro et les résultats de l’ensemble des pays sont résumés dans le chapitre intitulé "principaux résultats".


BIBLIOGRAPHIE

AGREST, 2001. Recensement agricole 2000 : Dossier d’information.
APCA., 1998. Nécessité d’une définition des conditions d’utilisation du terme fermier Dans: Dossier produits fermiers. Revue “Chambres d’agricultures”, 867, 25-35.
CONSEIL NATIONAL DE L’ALIMENTATION (CNA), 2003. Avis n°45 sur le développement des signes d’identification de la qualité et de l’origine des produits agricoles et alimentaires, nationaux et communautaires, 1-57.
FNAPF, 2001. Propositions sur les conditions d’utilisation du qualificatif fermier. L’info du producteur fermier, 3, 2-9.
FRANÇOIS M., 1996. Un projet de recherche européen sur les produits fermiers. Dans: Produits fermiers en région Centre. Editions du Oret, Paris, 107-127.
FRANÇOIS M., 2000. Commercialiser les produits locaux par les circuits courts. Dans : Commercialiser les produits locaux circuits courts et circuits longs, Observatoire européen LEADER, (7), 9-52.
LAGRANGE L., 1995. Propos sur la production fermière ou problématique de la production fermière, in "Différenciation et qualité des produits alimentaires", Ed. Enita.
MELET I., SYLVANDER B., 1994. Le marché des produits fermiers évolue vers le haut de gamme. Dans: Produits fermiers : des démarches collectives de développement, Actes des rencontres de Cibeins, Editions ADIR, Toulouse, 105-118.
MOINET F., 2002. Les produits fermiers. Dans : Les produits fermiers : transformation et commercialisation. Editions France Agricoles, Paris, 9-4 1.
RASON J., LEBECQUE A., ARNAUD Y., DUFOUR E., 2003. Coup de projecteur sur les produits fermiers : l’exemple du saucisson sec, Ind. AIim. Agric., 11, 15-20.


Haut de page | Télécharger l'article complet |

Calendrier des prochains évènements

Aucun événement

qrcode vpc

Pour Accéder au site V&PC depuis votre smartphone,
veuillez scanner ce flashcode.


Mentions légales

Politique de confidentialité

Contacter VPC

  • Adresse :    ADIV - 10, Rue Jacqueline Auriol
    ZAC du Parc Industriel des Gravanches
    63039 CLERMONT-FERRAND cedex 2