INTRODUCTION
I. MATERIELS & METHODES
L’étude a porté sur 32 porcs de race Korhogo, une race issue de l’amélioration de la race locale, tous de peau blanche. Des verrats craonnais auraient été croisés avec des femelles locales. Les meilleurs descendants de ce croisement auraient ensuite été accouplés avec des verrats Yorkshire. La stabilisation de cet étage a donné naissance à la souche de Korhogo dite « Race Korhogo ou Porc de Korhogo » (CIRAD, 2016).
Les données proviennent d’un échantillonnage de commodité réalisé sur les deux types d’élevage de porcs qui existent dans les environs de la ville de Korhogo (Figure 1), le choix des fermes et des animaux étant basé sur la facilité d’accès.
Le matériel utilisé pour prélever, traiter et analyser le sang des porcs de l’étude était : tubes secs 5 ml (tube à bouchon rouge), tubes EDTA 5 ml (tube à bouchon violet), aiguilles épicrâniennes (23G), corps de prélèvement BD vacutainer, gants, coton, glacière, centrifugeuse SIGMA 3-16L, pipettes Pasteur, tubes Eppendorf (1,5 mL), système analyseur Cobas® c 311 de Roche/Hitachi, les réactifs Cobas pour le dosage de minéraux (Calcium, Phosphore et Magnésium), plateforme Vidas® et un kit d’analyse Vidas pour la vitamine D3.
I.2.1. Démarche méthodologique
Critères d’inclusion
Pour être pris en compte dans l’étude, l’animal devait appartenir à l’une des deux types de fermes (couverte et semi-ouverte) (Figure 2). Étant donné l’importance de la vitamine D3 dans la croissance et la minéralisation osseuse, l’animal devait également être dans sa phase de croissance (de 2 à 6 mois d’âge).
Critères d’exclusion
Les porcs de type « coureur » des villages ont été exclus de cette étude. Ces animaux se promènent dans le village à l’air libre, leur alimentation ne peut être suivie. De plus, ils ne font clairement pas partie des élevages semi-modernes. Les autres critères de rejets étaient l’âge et l’état physiologique. En effet, les animaux âgés de moins de 2 mois de même que ceux âgés de plus de 6 mois n’ont pas été pris en compte. Les truies gestantes et allaitantes ont été exclues de l’étude.
I.2.2. Prélèvement et conditionnement des échantillons
La technique de contention consistait à faire coucher le porc en décubitus latéral droit. L’animal était maintenu immobile par des techniciens afin de faciliter le prélèvement du sang. Le sang a été prélevé sur la veine auriculaire gauche du porc dans deux tubes d’échantillon de sang par porc : l’un dans un tube EDTA pour l’obtention de plasma et l’autre dans un tube sec pour l’obtention de sérum. Au laboratoire, les tubes ont été centrifugés à 2 000 x g pendant 10 minutes. Le plasma et le sérum de chaque porcainsi obtenus ont été conservés au congélateur à -80 ºC jusqu’au moment de l’analyse (Thavasu et al., 1992 ; Thermofisher, 2007).
Figure 1 : Cartographie de la zone d’étude
Figure 2 : Photographies des types de fermes visitées, A : le type de ferme couverte et B : le type de ferme semi-ouverte
AB
I.2.3. Dosage des micronutriments
Dosage du 25 hydroxy cholécalciférol
La forme circulante de la vitamine D3 est le 25 hydroxy cholécalciférol (25OHD3). C’est cette forme qui est indicatrice du statut en vitamine D3 d’un individu (Thermofisher, 2007). Ainsi, les échantillons de plasma issus des tubes EDTA ont été analysés pour le 25OHD3 en utilisant des kits Vidas® 25 OH Vitamin D Total (Vidas® BioMerieux, Marcy l’Etoile, France) sur une mini-plateforme Vidas® d’immunoessais automatisée. Vidas® 25 OH Vitamine D Total est un test quantitatif utilisant la technique ELFA (Enzyme Linked Fluorescent Assay) (Tessema et al., 2017). Le test Vidas® 25 OH Vitamine D Total permet de mesurer, par une méthode immunoenzymatique, les teneurs en vitamine D2 (25OHD2) et vitamine D3 (25OHD3) dans le sérum et le plasma. Ce test, selon le fabriquant, offre des performances cliniques d’une grande précision.
Dosage des minéraux : Calcium, Phosphore et Magnésium
Les concentrations sériques de calcium, de phosphore et de magnésium ont été dosées en duplicata avec un CV variant entre 5% et 8%, par des méthodes enzymatiques colorimétriques utilisant des kits sur un analyseur Cobas® c 311. Cobas® c311 de Roche/Hitachi, un analyseur multi-paramètrique. Il permet selon les programmes intégrés de sélectionner le programme d’intérêt pour les analyses de Biochimie classique et d’immunoessai en phase homogène (Atalay et al., 2017). Le dosage des ions calcium a été fait avec la méthode de Schwarzenbach (avec o-cresolphthalein complexon) (Atalay et al., 2017), celui du phosphate inorganique selon Daly and Ertingshausen (avec phosphomolybdate) et le dosage du magnésium a été fait avec le Chlorophosphonazo III (GHS, 2020).
I.2.4. Statistiques
Méthode d’échantillonnage
Parmi les animaux de chaque type de ferme (14 fermes couvertes et 18 semi-ouvertes), nous avons constitué deux sous-groupes : le « Récemment sevré » ou sous-groupe 2-3 mois (regroupant les animaux âgés de 2 et 3 mois) et le "Prêt pour abattage" ou le sous-groupe 5-6 mois (regroupant les animaux de 5 et 6 mois).
Mesures statistiques
Les variables dépendantes de l’étude sont les concentrations plasmatiques ou sériques en vitamine D3, calcium, phosphore et magnésium. La variable explicative est le type de ferme. Pour l’analyse statistique, ce paramètre est codé comme binaire avec 1 pour Semi-ouvert et 2 pour Couvert.
Analyse statistique
Afin de décrire en détail les données, des boîtes à moustaches de Tukey (box plots) ont été utilisées pour analyser la dispersion.
Les variables dépendantes étant continues, nous avons utilisé les t-tests (test de Student) pour comparer leurs moyennes.
Le Tableau I présente les caractéristiques de la population étudiée. Ainsi, 14 porcelets étaient issus des fermes couvertes et 18 porcelets des fermes semi-ouvertes, soit un total de 32 porcelets. Les différents sous-groupes selon l’âge (Récemment sevré et Prêt pour abattage) n’étaient pas différents l’un par rapport à l’autre (P=0,92). La comparaison selon le sexe (Femelle et Mâle) indiquait également qu’il n’y avait pas de différence significative entre ces deux groupes (P= 0,66).
Tableau I : Caractéristiques des porcs inclus dans l’étude selon le type d’élevage
Le nombre (n) des animaux par groupe est indiqué pour chaque type de ferme. Le pourcentage de chaque groupe par rapport au nombre total d’animaux dans chaque type de ferme est indiqué entre parenthèses, les valeurs de p sont également indiquées.
Le Tableau II présente les statistiques descriptives des concentrations des micronutriments étudiés chez les porcelets ; la Figure 3 en illustre la distribution. En considérant l’ensemble des porcelets étudiés, il y a une grande variabilité de la teneur en vitamine D3 (S.D.=53). L’étendue de la variation de la vitamine D3 est de 122 et plus de 75% des porcelets ont une concentration en vitamine D plus faible que 116,45 ng/mL. La comparaison de la moyenne et de la médiane indique une distribution asymétrique des concentrations en vitamine D3.
Les données montrent que le calcium, le phosphore et le magnésium possèdent aussi une distribution asymétrique. Toutefois, les moyennes et les médianes des concentrations sériques en ces micronutriments sont très proches comme le montrent les valeurs des écart-types qui sont en dessous de 10 (de 3,98 à 9,45).
Dans le groupe Couvert, les écart-types des concentrations de l’ensemble des variables sont inférieurs à 10 (S.D. de 1,1 à 9,64). De plus, les moyennes et les médianes de chaque micronutriment sont proches. Les données de ce groupe ne sauraient donc expliquer la variabilité des données de la population générale.
Dans le groupe Semi-ouvert, seule la vitamine D3 présente une moyenne de concentrations dont l’écart-types est supérieur à 10 (S.D.=12,85). Les minéraux (calcium, phosphore et magnésium) ont des valeurs de concentrations dont les moyennes et les médianes sont similaires.
Tableau II : Statistiques descriptives des valeurs obtenues pour l’ensemble des porcelets et pour les deux groupes Couvert et Semi-ouvert
L’effectif de chaque groupe (n), les moyennes (Moy) et les écart-types (S.D.) sont indiqués. Les minima (Min), les médianes (Mdn) et les maxima (Max) de ces moyennes, tout comme les premiers (0,25) et les troisièmes quartiles (0,75) sont aussi reportés. Les concentrations sont exprimées en ng/mL pour la vitamine D et en mg/L pour les minéraux.
Figure 3 : Distribution des concentrations des micronutriments dosés selon le type de ferme
II.1.2. Variabilité interindividuelle dans les sous-groupes : 2-3 mois et 5-6 mois
Le Tableau III présente les statistiques descriptives des concentrations en micronutriments étudiés chez les porcelets des sous-groupes Récemment sevrés (2-3 mois) et Prêt pour abattage (5-6 mois) au sein de chaque groupe Couvert ou Semi-ouvert. La Figure 4 illustre leur distribution. Pour les porcelets du groupe Récemment sevrés, les concentrations de tous les micronutriments sont peu variables (S.D. varie de 0,98 à 6,38) dans le groupe Couvert. Celles des porcelets du sous-groupe "Prêt pour abattage" (c.-à-d. 5-6 mois) varient également peu (S.D. varie de 1,04 à 9,68) dans le groupe couvert.
Tableau III : Statistiques descriptives des valeurs obtenues chez les porcelets âgés de 2-3 mois et 5-6 mois
L’effectif de chaque sous-groupe (n), les moyennes (Moy) et les écart-types (S.D.) sont indiqués. Les minima (Min), les médianes (Mdn) et les maxima (Max) de ces moyennes, tout comme les premiers (0,25) et les troisièmes quartiles (0,75) sont aussi reportés. Les concentrations sont exprimées en ng/mL pour la vitamine D et en mg/L pour les minéraux.
Figure 4 : Distribution des concentrations des micronutriments dosés selon l'âge des porcelets
Dans le groupe des fermes semi-ouvertes, à l’exception du magnésium (S.D.=3,8), la variabilité des concentrations en vitamine D, calcium et magnésium (S.D. de 10,59-11,55) est élevée apparait chez les porcelets du sous-groupe « Récemment sevrés » (c.-à-d. 2-3 mois). Cependant, leurs moyennes (113,16 ; 95,63 ; 78,55) et médianes respectives (113,95 ; 99,5 ; 78,1) sont proches malgré la variabilité (29,9 ; 30 ; 29,1 respectivement).
En revanche, chez les porcelets du sous-groupe 5-6 mois des fermes semi-ouvertes, les concentrations en minéraux sont moins variables (S.D.=1,4-8,6) alors que celles en vitamine D varient d’un porcelet à l’autre (S.D.=14,33). Cependant, la moyenne (106,92) et la médiane (108,5) de la vitamine D sont similaires.
II.1.3. Variabilité interindividuelle dans les sous-groupes : Femelle et Mâle
Le Tableau IV présente les statistiques descriptives des concentrations en micronutriments étudiés chez les porcelets Femelle et Mâle au sein de chaque groupe Couvert ou Semi-ouvert. La distribution des données est présentée sur la Figure 5. Les concentrations de tous les micronutriments des femelles (S.D. varie de 1,03 à 10,12) et des mâles (S.D. varie de 1,1 à 9,54) sont peu variables dans les fermes couvertes.
Dans le groupe des fermes semi-ouvertes, les concentrations en vitamine D des porcelets femelles (S.D.=14,34) et mâles (S.D.=11,86) sont plus variables. La comparaison des valeurs médianes est plus appropriée. Pour les minéraux, la variabilité est faible chez les Femelles (S.D. varie de 2,39 à 10,35) et les Mâles (S.D. varie de 3,75 à 9,92) bien que plus élevée pour le phosphore tant chez les femelles (S.D.=10,35) que chez les mâles (S.D.=9,92).
Tableau IV : Statistiques descriptives des valeurs obtenues chez les porcelets femelles et mâles
L’effectif de chaque sous-groupe (n), les moyennes (Moy) et les écart-types (S.D.) sont indiqués. Les minima (Min), les médianes (Mdn) et les maxima (Max) de ces moyennes, tout comme les premiers (0,25) et les troisièmes quartiles (0,75) sont aussi reportés. Les concentrations sont exprimées en ng/mL pour la vitamine D et en mg/L pour les minéraux.
Figure 5 : Distribution des concentrations des micronutriments dosés selon le sexe des porcelets
Le Tableau V compare pour chaque micronutriment, les valeurs moyennes obtenues dans chaque type de ferme. Comparée à la ferme couverte, la valeur moyenne de la concentration en vitamine D3 est significativement supérieure dans le sang des porcelets des fermes Semi-ouvertes (p<0,0001). Les concentrations en calcium et en phosphore ne sont pas statistiquement différentes quel que soit le type de ferme (p=0,91 et p=0,3, respectivement). La concentration en magnésium est significativement plus basse dans le sérum des porcelets des fermes Semi-ouvertes comparées aux fermes couvertes (p<0,0001).
Tableau V : Comparaison des concentrations circulantes ou plasmatiques en micronutriments mesurées chez des porcs Korhogo selon le type de ferme
Les moyennes (Moy) des concentrations de chaque micronutriment dosé sont indiquées avec leurs écart-types (Std). La valeur absolue du T-test (│T│) et les valeurs de p sont également indiquées ; significatif si p ≤ 0,05.
II.3. Analyse des sous-groupes
II.3.1. Effet du type de ferme pour une classe d’âge donnée sur les concentrations circulantes ou plasmatiques des micronutriments dosés
Chez les porcelets du sous-groupe "Récemment sevré" (Tableau VI), les concentrations en vitamine D3 et en magnésium sont statistiquement différentes d’un type de ferme à l’autre. En effet, la concentration en vitamine D3 est significativement élevée (p<0,0001) chez les porcelets des fermes semi-ouvertes en comparaison avec les porcelets des fermes couvertes. La concentration en magnésium est significativement plus basse (p=0,043) chez ces porcelets en comparaison avec ceux des fermes couvertes (Tableau VI). Les concentrations en calcium et en phosphore dans le sérum des porcelets ne sont pas significativement différentes (p=0,9 et p=0,11, respectivement) quand on compare les porcelets des fermes couvertes à ceux des fermes semi-ouvertes. On note une tendance à des concentrations en phosphore plus faibles des porcelets des fermes semi-ouvertes (p=0,11) comparée à la valeur moyenne des concentrations obtenues chez les porcelets du sous-groupe "Récemment sevrés" des fermes couvertes.
Chez les porcelets du sous-groupe "Prêt pour abattage" (Tableau VII), la concentration en vitamine D3 est significativement élevée dans le sang des porcelets qui sont issus des fermes semi-ouvertes (p<0,0001) lorsqu’on la compare à la valeur moyenne des concentrations obtenues chez les porcelets des fermes couvertes. Les concentrations en calcium et en phosphore ne sont pas significativement différentes d’un type de ferme à l’autre (p=0,77 et p=0,98, respectivement) (Tableau VII). Dans ce même sous-groupe de porcelets "Prêt pour abattage", la concentration en magnésium est significativement basse (p=0,0001) dans le sang des porcelets qui sont issus des fermes semi-ouvertes (Tableau VII).
Tableau VI : Comparaison des concentrations circulantes ou plasmatiques en micronutriments mesurées chez les porcelets récemment sevrés
Les moyennes (Moy) des concentrations de chaque micronutriment dosé sont indiquées avec leurs écart-types (Std). La valeur absolue du T-test (│T│) et les valeurs de p sont également indiquées ; significatif si p ≤ 0,05.
Tableau VII : Comparaison des concentrations circulantes ou plasmatiques en micronutriments mesurées chez les porcelets prêts pour abattage
Les moyennes (Moy) des concentrations de chaque micronutriment dosé sont indiquées avec leurs écart-types (Std). La valeur absolue du T-test (│T│) et les valeurs de p sont également indiquées ; significatif si p ≤ 0,05.
II.3.2. Effet du type de ferme pour chaque sexe sur les concentrations circulantes ou plasmatiques micronutriments dosés
Chez les femelles, on observe que la concentration en vitamine D3 est significativement plus élevée (p<0,0001) dans le sang des porcelets (Tableau VIII) qui sont issus des fermes semi-ouvertes en comparaison avec la valeur moyenne des concentrations en vitamine D3 obtenues chez les porcelets des fermes couvertes. En revanche, les concentrations en calcium et en phosphore ne sont pas significativement différentes (p=0,94 et p=0,63, respectivement) d’un type de ferme à l’autre (Tableau VIII). La concentration en magnésium dans le sang est significativement plus basse (p=0,0002) chez les porcelets des fermes semi-ouvertes en comparaison avec la valeur moyenne des concentrations de magnésium obtenue en fermes couvertes (Tableau VIII).
On observe les mêmes différences chez les porcelets mâles (Tableau IX). En effet, la concentration de la vitamine D3 est significativement élevée (p<0,0001) dans le sang des porcelets des fermes semi-ouvertes en comparaison avec la valeur moyenne des concentrations en vitamine D3 obtenues chez les porcelets de fermes couvertes. Par ailleurs, la concentration en magnésium dans le sang est significativement plus basse (p=0,025) dans les fermes semi-ouvertes en comparaison avec la valeur moyenne des concentrations de magnésium obtenues chez les porcelets des fermes couvertes (Tableau IX).
Tableau VIII : Comparaison des concentrations circulantes ou plasmatiques en micronutriments mesurées dosés chez les porcelets femelles
Les moyennes (Moy) des concentrations de chaque micronutriment dosé sont indiquées avec leurs écart-types (Std). La valeur absolue du T-test (│T│) et les valeurs de p sont également indiquées ; significatif si p ≤ 0,05.
Tableau IX : Comparaison des concentrations circulantes ou plasmatiques en micronutriments mesurées dosés chez les porcelets mâles
Les moyennes (Moy) des concentrations de chaque micronutriment dosé sont indiquées avec leurs écart-types (Std). La valeur absolue du T-test (│T│) et les valeurs de p sont également indiquées ; significatif si p ≤ 0,05.
Références bibliographiques :